La vie de Cethirine Emmerich, Chapître VI, VII
CHAPITRE SIXIEME.
Commencement de la vie publique et de la prédication du Sauveur jusqu'aux noces de Cana.
- Jésus vient sur les bords du Jourdain.
- Jésus à Ophra, à Dibon, à Eléalé, à Bethjésimoth, à Siloh, à Kibza'm, à Thébez, à Capharnaum.
- Il guérit à distance un jeune garçon.
- Il appelle à lui Pierre, Philippe et Nathanael.
(Du 6 au 30 décembre).
(6 décembre.) Au point du jour, je vis Jésus traverser le Jourdain à cet endroit où le fleuve est si étroit et où il l'avait traversé quarante jours auparavant. Il y avait là des poutres à l'aide desquelles on pouvait passer soi même. Ce n'était pas là le passage où aboutissait le chemin le plus fréquenté, mais un passage secondaire. Jésus alors descendit la rive orientale du Jourdain jusque vis à vis de l'endroit où Jean donnait le baptême. Je vis là Jean qui enseignait et baptisait, le montrer au doigt aussitôt et crier : "Voici l'agneau de Dieu qui efface les péchés du monde. " Jésus revint du bord du fleuve à Bethabara.
Cependant André et Saturnin qui étaient auprès de Jean passèrent le fleuve en toute hâte : ils prirent le chemin que Jésus avait pris. Ils furent suivis par un des parents de Joseph d'Arimathie et par deux autres disciples de Jean. Lorsqu'ils furent de l'autre côté du fleuve, ils coururent après Jésus, et je vis Jésus se retourner, aller à leur rencontre et leur demander ce qu'ils cherchaient. Sur quoi, André, tout joyeux de l'avoir retrouvé, lui demanda où il demeurait, et Jésus leur dit de le suivre, puis il les conduisit à une hôtellerie située en avant de Bethabara, vis à vis le fleuve ; ce fut là qu'ils s'arrêtèrent. Jésus resta aujourd'hui à Bethabara avec les cinq disciples et il prit ses repas avec eux. Il leur dit qu'il allait commencer sa carrière de prédication et réunir des disciples autour de lui. André lui parla de plusieurs personnes de sa connaissance dont il lui fit l'éloge à cet effet ; il fit mention de Pierre, de Philippe et de Nathanaël. Jésus parla du baptême à donner ici dans le Jourdain, et dit que quelques uns d'entre eux auraient à baptiser dans cet endroit, qu'il n'y avait près d'ici d'emplacement approprié que celui où Jean baptisait, et que pourtant il né convenait pas que celui ci fût dépossédé. Alors Jésus parla de la destination et de la mission de Jean dont le terme était proche, et il confirma tout ce qu'avait dit Jean de lui même et du Messie. Jésus parla aussi de la préparation à sa prédication publique faite dans le désert et de la préparation qui doit précéder toute oeuvre importante. Il se montra affectueux et confiant vis à vis des disciples, ceux ci étaient respectueux et un peu intimidés. Ils passèrent la nuit ici.
(7 décembre.) Le matin, Jésus en compagnie des disciples, alla de Bethabara aux maisons voisines du passage du Jourdain et il enseigna dans une réunion. Plus tard il passa le fleuve et enseigna dans une bourgade située à une lieue avant Jéricho. Il n'y avait guère qu'une vingtaine de maisons. une foule d'aspirants au baptême et de disciples de Jean allaient et venaient pour l'entendre et pour rapporter à Jean ce qu'ils savaient de lui. Il était environ midi lorsqu'il enseigna ici.
Jésus chargea plusieurs disciples d'aller, après le sabbat, de l'autre côté du Jourdain, à une lieue au dessus de Bethabara et d'y remettre en état une fontaine baptismale où Jean, venant d'Ainon, avait donné le baptême avant d'aller baptiser sur la rive occidentale du Jourdain en face de Bethabara. On voulut préparer ici un repas pour Jésus j mais il partit et revint avant le sabbat à Bethabara où il célébra le sabbat jusqu'au samedi soir et où il enseigna dans la synagogue. Il mangea chez le préposé de l'école et coucha dans sa maison.
(9 décembre.) Je vis Jésus accompagné d'André, de Saturnin et d'une foule nombreuse dans laquelle se trouvaient aussi des disciples de Jean, aller il la fontaine baptismale située à une lieue au nord de Bethabara, en face de la contrée de Galgala. Cet endroit, où Jean avait baptisé quelque temps, avant d'aller s'établir près de Jéricho, avait été remis en état par ses disciples. La fontaine baptismale n'était pas aussi grande que celle de Jean près de Jéricho. Il y avait un rebord élevé avec une langue de terre qui s'avançait dans l'eau et ou se tenait celui qui administrait le baptême. Le rebord était entouré d'un petit canal d'ou l'on pouvait faire entrer l'eau dans la fontaine baptismale. Il y a maintenant dans ce quartier trois fontaines baptismales ; celle qui est au dessus de Bethabara, celle où Jésus a été baptisé sur l'île qui s'est élevée dans le Jourdain, et enfin celle où Jean baptise.
Jésus arrivé ici versa dans la fontaine baptismale de l'eau de la fontaine de l'île dans laquelle il avait été baptisé et qu'André avait apportée dans une outre ; puis il la bénit. Tous les baptisés furent singulièrement émus. André et Saturnin baptisèrent. Ce n'était pas une immersion complète. Les néophytes entraient dans l'eau près du rebord ; on leur mettait les mains sur les épaules ; le baptisant versait trois fois de l'eau sur eux avec la main et baptisait au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit ; ce que ne faisait pas Jean qui se servait d'un vase à trois rainures. Beaucoup de personnes venaient se faire baptiser, particulièrement des gens de la Pérée.
Jésus enseigna debout, sur un petit tertre de gazon qui se trouvait près de là ; il parla de la pénitence, du baptême et du Saint Esprit. Il dit : " Mon Père a envoyé le Saint Esprit lorsque j'ai été baptisé, et il a dit : C'est mon Fils bien aimé dans lequel je me complais. Il en dit autant à tout homme qui aime son Père céleste et qui se repent de ses péchés ; il envoie son Saint Esprit sur tous ceux qui sont baptisés au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, et tous alors sont ses fils dans lesquels il se complaît : car il est le père de tous ceux qui reçoivent son baptême et reçoivent de lui par là une nouvelle naissance. ))
Je m'étonne toujours que tout soit raconté si brièvement dans l'Evangile, et d'y voir Jésus, lorsqu'André l'a suivi après le témoignage rendu par Jean, se rencontrer aussitôt avec Pierre qui pourtant n'était pas là, mais en Galilée. Ce qui m'étonne encore davantage, c'est d'y voir la Cène et la Passion suivre de si près l'entrée à Jérusalem du dimanche des Rameaux, lorsque dans l'intervalle j'entends Jésus faire de si nombreuses instructions. Je pense que Jésus séjournera bien ici une quinzaine de jours avant d'aller en Galilée.
André, à proprement parler, n'était pas encore admis comme disciple. Jésus ne l'avait pas appelé, il était venu de lui même et s'était offert ; il avait le désir d'être avec Jésus : Il est plus empressé et se met plus en avant que Pierre qui était porté à se dire : " Je suis trop peu de chose pour cela, cela surpasse mes forces, " et qui là dessus retournait à ses affaires. Saturnin et les deux neveux de Joseph d'Arimathie, Aram et Théméni, s'étaient joints à Jésus de la même manière qu'André.
Plusieurs autres disciples de Jean seraient venus à Jésus, s'ils n'en avaient été empêchés par quelques uns de leurs compagnons, dont l'amour propre était blessé. Ceux ci se plaignaient à Jean, et trouvaient que Jésus commettait une usurpation en baptisant ici, que ce n'était pas là sa mission, et Jean avait fort à faire pour redresser leurs idées bornées. Il leur disait de se souvenir de ses discours dans lesquels il leur avait toujours annoncé d'avance qu'il ne faisait que préparer le chemin, qu'il se retirerait quand les voies seraient préparées, et que ce serait bientôt. Mais ils étaient très attachés à Jean, et cela ne pouvait pas leur entrer dans l'esprit. Aujourd'hui, il y avait déjà tant de monde à l'endroit où Jésus baptisait, qu'il dit aux disciples que le lendemain il fallait aller ailleurs. il passa encore la nuit à Bethabara, chez le chef de la synagogue.
(10 décembre.) Ce matin, je vis Jésus, accompagné d'une vingtaine de personnes, dont étaient André, Saturnin, Aram et Théméni, quitter Bethabara, traverser le Jourdain à l'endroit où était le passage le plus fréquenté et le plus facile, et laissant Galgala à droite, se rendre dans une ville appelée Ophra, qui était cachée dans une étroite vallée au milieu des montagnes. Il y passait fréquemment des gens venant du pays qui est derrière Sodome et Gomorrhe lesquels allaient à l'orient du Jourdain, sur des chameaux chargés de marchandises, et se faisaient baptiser par Jean. Il y avait ici un chemin de traverse menant de la Judée au Jourdain : c'était du reste un endroit fort peu fréquenté, situé à trois ou quatre lieues de l'endroit où Jean baptisait : je crois qu'il était moins éloigné de Jéricho : il y avait environ sept lieues de là à Jérusalem. La température y était froide et il y avait peu de soleil : la ville était bien bâtie. Les habitants, presque tous marchands, publicains ou contrebandiers, avaient de l'aisance : ils semblaient faire de bonnes affaires avec les gens qui passaient. Ils n'étaient pas méchants, mais indifférents, comme le sont souvent des marchands et des hôteliers auxquels tout vient à souhait. Je n'avais pas encore été dans cet endroit, je n'y avais jamais vu Jésus jusqu'à aujourd'hui. Les habitants ne s'étaient pas encore préoccupés du baptême de Jean. Ils n'aspiraient pas au salut : leur ville était de celles dont on a coutume de dire : C'est un endroit ou l'on vit bien.
Lorsqu'ils approchèrent de la ville, Jésus envoya en avant les neveux de Joseph d'Arimathie pour demander les clefs de la synagogue et pour convoquer le peuple à venir l'entendre. Il se servait toujours d'eux pour de semblables missions : car ils étaient avenants et avisés. à son entrée dans la ville, des possédés et démoniaques accoururent autour de lui et ils criaient de loin : " Voici le prophète, Fils de Dieu, le Christ Jésus, notre ennemi : il vient nous chasser. "Jésus leur commanda de se taire et de se tenir tranquilles.
Ils s'apaisèrent aussitôt et l'accompagnèrent à la synagogue qui était presque à l'autre extrémité de la ville. Il y enseigna jusqu'au soir, et n'en sortit qu'une fois pour prendre quelque chose. Il parla de l'approche du règne de Dieu, de la nécessité du baptême ; il pressa vivement les habitants de se réveiller de leur tiédeur et de leur fausse sécurité, afin que le jugement ne les atteignît pas. Il parla aussi fortement contre leurs pratiques usuraires, leur commerce frauduleux, et contre les péchés habituels aux marchands et aux publicains. Ils ne le contredirent pas, mais d'autre part ils n'étaient pas très faciles à émouvoir : car ils étaient esclaves de leurs habitudes mercantiles ; quelques uns, pourtant furent très touchés et prirent d'autres sentiments. Le soir, plusieurs d'entre eux, hommes considérables ou gens de moindre importance, vinrent je visiter à l'endroit où il logeait, et se montrèrent très décidés à se faire baptiser. Dès les jours suivants ils allèrent trouver Jean. Jésus passa la nuit dans l'hôtellerie.
(11 décembre.) Aujourd'hui Jésus quitta Ophra de bonne heure, et revint vers Bethabara avec ses disciples. Ils se séparèrent sur le chemin. Il envoya André en avant avec la plupart de ses compagnons, par la roule qu'ils avaient suivie en venant ici ; lui même avec Saturnin et le neveu de Joseph d'Arimathie (je crois qu'il n'y en avait qu'un avec lui), passa plus près du lieu où Jean baptisait, suivant le chemin par où il avait passé, lorsque celui ci, pour la première fois après le baptême, avait rendu témoignage de lui. Cette fois il n'arriva rien de particulier. Près du chemin qui est en face du passage du Jourdain, Jésus entra dans quelques maisons, enseigna et exhorta au baptême.
Ce ne fut que dans l'après midi qu'ils arrivèrent à Bethabara, et je vis le même jour Jésus enseigner encore au lieu du baptême, où André et Saturnin baptisèrent' Comme c'étaient chaque jour de nouveaux auditeurs qui venaient pour se faire baptiser, son enseignement était presque toujours le même : il répéta souvent que son Père céleste disait à tous ceux qui faisaient pénitence et recevaient le baptême : "Voici mon Fils bien aimé ", qu'ils seraient tous ses enfants, etc. : la plupart d'entre eux venaient du pays de Philippe le Tétrarque, qui était un bon prince. Ses sujets étaient assez heureux, et c'est pourquoi ils n'avaient guère pensé jusqu'alors à se faire baptiser." Le soir, elle dit en termes peu précis : " Jésus, après la fin de son jeûne, s'arrête ici environ vingt jours : donc encore quinze jours, et il ira à Cana où sa mère l'attend. "
(12 décembre.) Du 12 au 13, elle fut malade à la mort : le 13 au soir, se trouvant mieux, elle raconta ce qui suit :
Aujourd'hui, Jésus, en compagnie de trois disciples, est parti de Bethabara pour cette ville, où il s'était trouvé le 15 octobre pour la fête des Tabernacles. C'était à Dibon qu'il allait. Sur la route, il enseigna dans plusieurs maisons placées les unes à côté des autres. Arrivé à la ville, il enseigna dans la synagogue, qui est séparée de la ville et située dans le fond de la vallée qu'il avait parcourue lors de la fête des Tabernacles. Il passa la nuit dans une hôtellerie ou une échoppe située un peu à l'écart' où des laboureurs des environs venaient loger et prendre leur nourriture. On fait à présent les semailles sur le côté de la montagne qui est exposé au soleil, et on récoltera à Pâques. Ici l'on bêche la terre, car le sol est pierreux et sablonneux ; on ne peut pas faire usage de l'instrument avec lequel on laboure ordinairement. On plante aussi certaines herbes, et on a commencé à rentrer une partie de la récolte arriérée. Jésus raconta dans la synagogue et aux laboureurs la parabole du semeur qu'il leur expliqua. Il n'expliquait pas toujours ses paraboles : devant les pharisiens il les racontait souvent sans commentaires.
Le 13, il était encore ici et occupé de la même manière. Aujourd'hui, André, Saturnin et d'autres disciples qui baptisaient hier près de Bethabara, sont allés
Ophra pour confirmer les gens de l'endroit dans les bons sentiments que la prédication de Jésus a réveillés en eux.
Dans l'habitation où se tient Jésus, près de Dibon, il y a un endroit séparé où les femmes des gens de la campagne viennent préparer leurs aliments. Ce sont tous de bonnes gens, vivant simplement. Les habitants du pays ne sont pas bien disposés pour Jésus, qui, lors de la fête des Tabernacles, a guéri plusieurs malades à Dibon. Il n'était pas proprement à Dibon même, ni chez les publicains qui demeuraient plus près du Jourdain, mais dans la vallée qui avait une longueur d'environ trois lieues.
(14 15 décembre.) Jésus partit aujourd'hui de l'hôtellerie de Dibon. Ces habitations étaient disséminées dans la vallée entre Dibon et le Jourdain, laquelle peut avoir trois lieues de long. Il se dirigea vers le midi, et prit un chemin qui conduisait au levant et qui était deux lieues plus au midi du Jourdain que celui de Bethabara par lequel il était venu. Il arriva à quatre lieues environ de Dibon, dans un endroit qui a un nom singulier. Je ne voulais pas croire que ce fût un nom de lieu. Existe t il un lieu ainsi nommé ?
Le nom me parut étrange parce qu'étant enfants, en conduisant les vaches à travers champs, nous criions toujours : Hélo ! hélo ! et il me fallut entendre plusieurs fois ce nom avant de l'accepter. Quoi donc, me disais je, c'est là Hélo ! hélo ! le cri des enfants quand ils conduisent les vaches ? Lorsque nous courions les champs et que nous criions à nos compagnons de faire aller leurs vaches` de tel ou tel côté, ils me criaient à leur tour : Hélo ! hélo ? Anne Catherine Emmerich, si tu veux venir avec nous au gué, viens donc vite : hélo ! hé, loh loh ! Elle répéta cela en imitant les modulations du cornet avec lequel on appelle les vaches en prononçant les noms de tous ses compagnons d'enfance et en regrettant ce temps d'innocence et de piété.
Jésus arriva à Eléalé avec environ sept disciples : il doit lui en être venu quelques uns que j'ai oubliés. André, Saturnin et d'autres qui étaient allés à Ophra, sont revenus je ne sais plus bien où : ils doivent bientôt venir le retrouver. Jésus entra chez le chef de la synagogue. Le soir du sabbat, il enseigna dans la synagogue sur une parabole où il était question de branches d'arbres vacillantes qui laissaient tomber les fleurs et ne portaient pas de fruits. Tout ce que je me rappelle à ce sujet, est qu'il voulut par là reprocher à ses auditeurs que la plupart du temps le baptême de Jean ne les rendait pas meilleurs, et qu'ils laissaient emporter par tous les vents les fleurs de la pénitence sans qu'elles arrivassent à porter des fruits. C'est ainsi qu'ils étaient dans cet endroit. Il choisit de préférence cette comparaison, parce qu'ils vivaient pour la plupart du produit de leurs arbres fruitiers. Ils allaient vendre leurs fruits très loin, car l'endroit était écarté, et il n'y avait pas de grande route. ils faisaient aussi beaucoup de couvertures et des broderies grossières. Jésus, jusqu'à présent, n'avait pas rencontré de contradicteurs ; les gens de Dibon et des alentours l'avaient pris à gré, et ne cessaient pas de dire qu'ils n'avaient jamais entendu personne enseigner comme lui : les vieillards le comparaient toujours aux prophètes, de l'enseignement desquels leurs ancêtres leur avaient parlé.
Jésus a récemment envoyé un message à sa mère à Cana : il lui a fait dire à quel moment il viendrait. Il n'y avait encore personne de Jérusalem près de lui, mais la plupart de ceux qui l'avaient suivi après le baptême de Jean, se trouvèrent de nouveau avec lui à Bethabara et ils allaient et venaient de Jean à lui et de lui à Jean.
Le samedi 15, Jésus fit ici la clôture du sabbat.
(16 17 décembre.) Le dimanche 16, Jésus alla à environ trois lieues vers le couchant dans un endroit nommé Bethjésimoth, situé sur les pentes orientale et méridionale d'une montagne, auprès d'une petite rivière, à environ une lieue du Jourdain. Pendant qu'il était e tête pour s'y rendre, André, Saturnin, et beaucoup d'autres disciples de Jean vinrent se joindre à lui, et j'entendis sur le chemin le Seigneur leur parler des enfants d'Israël qui avaient campé ici et de ce que Mo'se et Josué leur avaient dit. Il en fit une application au temps présent et à son enseignement. Bethjésimoth n'est pas très grand, mais très fertile, surtout en vins.
Lorsque Jésus arriva, on venait de faire sortir des démoniaques d'une maison où ils étaient renfermés ensemble, pour les mener prendre l'air. Ils se mirent à faire du bruit et à crier : " Voilà qu'il vient, le Prophète ! Il va nous chasser, etc. " Jésus se retourna vers eux et leur commanda de se taire, leur disant que leurs chaînes allaient tomber et qu'ils devaient le suivre à la synagogue. Leurs chaînes tombèrent en effet par un miracle, et ces gens, devenus tout à fait paisibles, se prosternèrent devant Jésus, le remercièrent et le suivirent. Il enseigna en paraboles où il était question de la fertilité de la terre et de la culture de la vigne. Ensuite il visita plusieurs malades dans les maisons et les guérit. Cet endroit ne se trouve sur aucune grande route, les habitants sont obligés de porter eux mêmes leurs fruits au marché.
(18 20 décembre.) Jésus partit aujourd'hui quoique les habitants le priassent instamment de `rester, parce que c'était là qu'il avait guéri pour la première fois depuis son séjour au désert : il était accompagné d'André, de Saturnin, des neveux de Joseph d'Arimathie, en tout d'une douzaine de personnes. Il alla obliquement vers le nord, pendant deux lieues, jusqu'à ce passage fréquenté du Jourdain auquel conduisait la route de Dibon et où il avait passé lors de la fête des Tabernacles en se rendant de Galgala à Dibon. On mettait un temps assez long à passer parce que, vu l'escarpement des rives, les lieux de débarquement n'étaient pas en face l'un de l'autre. Sur la rive occidentale, je les vis faire encore à peu près une lieue dans la direction de Samarie, puis, longeant la base d'une montagne, arriver dans un petit endroit qui consistait en un groupe de maisons sans école. A quelques lieues de là, au couchant, se trouve dans un coin de la montagne le lieu où Jésus, du 22 au 23 octobre, visita l'essénien Ja're. Ce petit endroit était habité par des bergers et d'autres braves gens qui étaient vêtus à peu près comme les bergers à la crèche. Jésus enseigna sur un lieu élevé où une chaire de pierre était dressée en plein air. Ces gens avaient reçu le baptême de Jean.
Le 10 vers le soir, je vis Jésus arriver sur le haut d'une montagne qui s'élevait en pente douce, à Silo, ville assez délabrée, aux portes de laquelle se trouvaient de grandes tours en ruines. Devant la ville, à quelque distance était un couvent d'Esséniens a moitié détruit et en outre une maison peu éloignée de l'entrée de la ville où jadis les Benjamites avaient renfermé des jeunes filles qu'ils avaient enlevées à Silo, lors de la fête des Tabernacles. La synagogue de Silo était dans une situation très élevée, tout au haut de la ville, et on avait de là une vue extraordinairement étendue. On voyait les montagnes de Jérusalem, la mer de Galilée et une quantité de montagnes. Les habitants ne me semblèrent pas bons : ils étaient orgueilleux, pleins de présomption et d'assurance.
Je vis Jésus, avec ses compagnons qui pouvaient bien être au nombre de douze, en y comprenant André et Saturnin, entrer dans une grande maison qui semblait habitée par plusieurs pharisiens et scribes. Tout au moins ils la fréquentaient, car j'en vis bien une vingtaine rassemblés autour de lui avec leurs longues robes, leurs ceintures et de longs appendices d'un travail grossier pendant aux manches. Je crois qu'il trouvera ici des contradicteurs, car ils faisaient semblant de ne pas connaître Jésus et lui adressaient des paroles piquantes comme celle ci : "Qu'est ce à dire ? Il y a maintenant deux baptêmes, celui de Jean et celui de Jésus, le fils du charpentier de Galilée : lequel est donc le bon ? On entend dire aussi que des femmes s'attachent à la mère de ce fils de charpentier, par exemple telle veuve avec ses deux fils ( j'ai oublié le nom ), et qu'elle court ainsi de côté et d'autre pour faire des partisans à son fils. Quant à eux, disaient ils, ils n'avaient que faire de semblables nouveautés, ils avaient la promesse et leur loi. " Ils ne disaient pas ces choses ouvertement et brutalement, mais ils traitaient Jésus avec une politesse aigre et moqueuse, et cela me rappelait la malveillance astucieuse et cachée sous une douceur hypocrite que j'ai souvent rencontrée sur mon chemin de croix de la part de gens éclairés qui m'observaient comme une personne suspecte.
A l'endroit où Jésus entra dans Silo avec les disciples se trouvait une maison où les docteurs et les prophètes en voyage avaient le droit de loger ; elle était attenante aux habitations et aux écoles des pharisiens et des sadducéens de l'endroit ; c'était comme un séminaire. Elle n'était pas éloignée du point culminant de la montagne où le tabernacle et l'arche d'alliance avaient séjourné autrefois. Ce point culminant était comme un rocher isolé et escarpé, termine par une vaste plate forme, grande presque comme Dulmen (lieu où habitait la narratrice), si je ne me trompe. Il y avait là un grand emplacement entouré d'un mur à moitié écroulé et où se trouvaient les restes des fondements d'un ancien édifice en pierre, élevé au dessus du tabernacle. Peut être aussi n'y avait il eu là qu'un beau mur et une grande halle. à la place où l'arche d'alliance avait reposé autrefois, il y avait, sous un toit soutenu par une arcade, une colonne comme celle de Galgala ; sous cette colonne, se trouvait également une espèce de caveau, creusé dans le roc, où l'arche d'alliance avait été déposée. Sur cette hauteur, entourée d'un mur, il y avait en outre une synagogue, et non loin de la place de l'arche d'alliance un lieu pour les sacrifices et une fosse couverte ou l'on jetait les immondices lors de l'immolation des victimes ; car j'entendis dire qu'il était encore permis de sacrifier là trois ou quatre fois dans l'année.
Je ne sais plus dans quel ordre se succédèrent ici les actes et les prédications de Jésus ; je me souviens seulement qu'il répondit à leurs sarcasmes qu'il était celui dont ils parlaient. Et comme il faisait mention de la voix qui s'était fait entendre à son baptême, il dit que c'était la voix de son père qui était aussi le père de quiconque se repentait de ses péchés et renaissait par le baptême. Ils ne voulaient pas le laisser aller, non plus que ses disciples, à la place de l'arche d'alliance, parce que c'était un lieu très saint ; il y alla pourtant et leur reprocha que leurs pères avaient perdu l'arche d'alliance à cause de leur méchanceté ; maintenant, ajouta t il, ils continuaient à faire de même près de cette place vide ; ils avaient violé la loi autrefois et ils la violaient encore ; mais de même que l'arche d'alliance s'était éloignée d'eux, de même aussi l'accomplissement de la promesse allait s'éloigner d'eux maintenant. Comme là dessus ils voulurent entrer en dispute avec lui en lui alléguant des passages de la loi ; il les plaça deux par deux, les interrogea comme des enfants, leur proposa diverses questions difficiles sur des textes de la loi, et ils ne trouvèrent rien à répondre.
Ils étaient très confus et très irrités, ils se poussaient les uns les autres et murmuraient, mais ils commencèrent à se retirer. Jésus les conduisit aussi à la fosse couverte où l'on jetait les débris qui restaient après les sacrifices ; il la fit découvrir et la faisant servir à une comparaison, il dit d'eux qu'ils étaient comme cette fosse, remplis à l'intérieur d'immondices et de pourriture impropres au sacrifice, mais proprement recouverts à l'extérieur, et tout cela dans un endroit d'où le sanctuaire avait été retiré à cause des péchés de leurs ancêtres. Il leur dit, en outre, qu'il ne reviendrait plus les visiter. Tous se retirèrent pleins de rage.
Jésus enseigna ici dans la synagogue et parla spécialement du respect dû à la vieillesse et de la piété filiale. Il s'exprima sévèrement à ce sujet, car les gens. de Silo avaient depuis longtemps la mauvaise habitude, quand leurs parents étaient arrivés à un grand âge, de les mépriser, de les laisser de côté et de les chasser. une route vient ici, de Bethel qui est situé au midi ; Lebona est dans le voisinage. Il peut y avoir huit à neuf lieues d'ici à Samarie ; la ville est bâtie tout autour du rocher, elle n'est pas très peuplée ; il y a une école de pharisiens et une autre appartenant à d'autres sectes. C'est ici qu'est enterré le prophète Jonas.
(21 décembre.) Aujourd'hui dans la matinée, Jésus sortit par l'autre côté de la ville et se dirigea vers le nord ouest. Je vis André, Saturnin et les neveux de Joseph d'Arimathie se séparer de lui et aller en avant vers la Galilée. André doit aller voir Pierre et lui dire qu'il a retrouvé Jésus ; c'est ici que s'applique le verset 41 du premier chapitre de saint Jean. Je vis Jésus accompagné des autres disciples de Jean qui étaient avec lui, arriver à Kibza'm, le vendredi, avant le sabbat. Cette ville est située dans la vallée, entre les embranchements de la chaîne de montagnes qui s'étend au milieu du pays, et qui a ici presque la forme d'une griffe de loup. Les gens de l'endroit étaient bons, hospitaliers, et bien disposés pour Jésus qu'ils attendaient. C'était, je crois, une ville de lévites. Jésus entra, près de l'école, chez un préposé.
Je vis Lazare, Marthe, Jeanne Chusa, le fils de Siméon qui avait un emploi au temple et le vieux serviteur de Lazare arriver ici et saluer Jésus. Ils s'étaient mis en route pour aller aux noces de Cana et je crois qu'ils savaient par un message qu'ils rencontreraient ici Jésus.
Jésus accueillait toujours Lazare comme un ami qu'il affectionnait particulièrement : cependant je ne l'entendais jamais demander : " Que fait tel ou tel de tes parents ou de les amis. " Le jour du sabbat, Jésus enseigna en paraboles que j'ai oubliées. Kibzaim est caché dans un coin de montagne. Les habitants vivent du produit de leurs arbres fruitiers, et il y a en outre ici beaucoup de fabricants de tentes et de tapis, mais je n'ai vu nulle part autant de faiseurs de sandales. Jésus resta encore ici aujourd'hui pour le sabbat et il guérit plusieurs malades. C'étaient des hydropiques et des idiots qu'on lui apportait sur de petits lits devant l'école. Jésus assista à un repas chez un lévite de distinction.
Les noces de Cana ne peuvent pas avoir lieu avant dix jours, car je vois qu'ici et partout dans le pays, on se prépare à une grande tête de huit jours ; c'est la fête de la dédicace du Temple, qui se célèbre avec beaucoup de flambeaux dans une vision relative à la Nativité du Christ, j'ai vu récemment saint Joseph la célébrer, huit jours après, dans la grotte de la crèche, parce que, la nuit de la naissance de Jésus, le jour de cette fête tombait le 7 décembre. Je crois que Jésus ira à Cana aussitôt après la fête. J'ai vu encore que Nathanael, Philippe et d'autres disciples doivent se rencontrer ces jours ci avec Jésus, je ne sais plus bien dans quel endroit.
( 22 décembre. ) Le soir après le sabbat. Jésus alla encore jusqu'à Sichar où il arriva tard et passa la nuit dans un logement préparé pour lui. Lazare et ses compagnons se rendirent directement de Kibza'm en Galilée.
(23 décembre.) Le jour suivant, Jésus partit de bonne heure de Sichar et se dirigea au nord est vers Thébez. à Sichar ou Sichem il ne put pas enseigner, il né s'y trouvait pas de juifs, mais seulement des Samaritains et encore des gens d'une autre espèce. Ils sont venu, ici à la suite de la captivité de Babylone ou de quelque guerre ; ils vont au temple de Jérusalem, mais ne prennent point part aux sacrifices. Près de Sichem sont de beaux champs que Jacob avait achetés pour son fils Joseph. une partie de cette contrée appartient déjà à l'Hérode de Galilée. Il y a une frontière tracée à travers la vallée par un mur de terre, un sentier et des poteaux. une grande route traverse Thébez qui est une ville assez considérable. Il s'y fait du commerce : il y passe des chameaux dont le chargement est très élevé. C'est un singulier spectacle que de voir ces animaux, avec leur haut bagage qui les fait ressembler à de petites tours, gravir lentement la montagne, pendant que leur tête sur son long cou se balance à droite et à gauche devant leur énorme charge. On fait aussi ici le commerce de la soie crue.
Les habitants n'étaient pas mauvais et il ne résistait pas à Jésus, mais ce n'étaient pas non plus des gens simples et candides : ils étaient tièdes comme le sont souvent les commerçants aisés : les prêtres et les scribes montraient assez d'assurance et gardaient la neutralité. Lorsque Jésus arriva dans cet endroit, des possédés et des fous se mirent à crier : "Voici le Prophète de Galilée ! il a pouvoir sur nous : il va nous chasser. " il leur ordonna de se tenir tranquilles et ils s'apaisèrent. Jésus logea ici près de la synagogue et comme on le suivait et qu'on lui amenait beaucoup de malades, il en guérit plusieurs. Il enseigna le soir dans l'école de Thébez et prit part à la célébration de la fête de la dédicace du Temple, qui commençait ce soir là. On alluma sept flambeaux dans l'école et on en fit autant dans toutes les maisons. Je vis aussi dans la campagne et sur la route, prés des habitations des bergers, de petits fagots allumés posés sur des perches. Thébez était admirablement située sur une hauteur : on pouvait voir à quelque distance la route qui coupait la montagne et les chameaux chargés qui la descendaient : on ne voyait Pas cela dans le voisinage.
André, Saturnin et les neveux de Joseph étaient déjà partis de Silo pour la Galilée. André était allé dans sa famille à Bethsaïda : il avait dit à Pierre qu'il avait retrouvé le Messie qui allait venir en Galilée et qu'il voulait lui amener Pierre. Tous ceux là allèrent à Arbela (1), qui s'appelle aussi Betharbel, trouver Nathanaël Khased qui avait là des affaires, et ils le prirent pour l'emmener avec eux à Gennabris et y célébrer la fête, car Khased y avait alors sa résidence dans une grande maison qui se trouvait devant la ville avec plusieurs autres. Ils parlèrent beaucoup de Jésus, et ce fut proprement André qui les conduisit là à la fête, parce qu'il faisait beaucoup de cas de Nathanael ainsi qu'eux tous. Ils désiraient savoir son avis ; quant à lui, il ne voulait pas donner beaucoup d'importance à cette affaire.
Note 1 : Arbela était à environ une lieue et demie au sud ouest de Tibériade, près du lac de Génésareth.
Lazare avait conduit Marthe et Jeanne Chusa près de Marie, à Capharna>m, où elle était revenue de Cana : lui même repartit avec le fils de Siméon pour Tibériade où ils comptaient trouver Jésus ; le fiancé de Cana y alla aussi à la rencontre du Seigneur. Ce fiance était fils d'une fille de Sobé, soeur de sainte Anne : il s'appelait aussi Nathanaël et il n'était pas de Cana, seulement il s'y mariait. La ville de Gennabris était populeuse : une grande route y passait ; il y avait beaucoup de trafic, et on faisait notamment le commerce de soie. Elle était à environ deux lieues de Tibériade, mais séparée par des montagnes, de sorte qu'il fallait aller un peu au midi, puis tourner de nouveau vers Tibériade, entre cette ville et Emmaus. Arbela était située entre Séphoris et Tibériade.
(24 décembre. ) Jésus partit de Thébez avant le jour avec les disciples : il alla d'abord au levant, puis longeant les montagnes qui sont dans la vallée du Jourdain, il se dirigea au nord vers Tibériade. Il passa par Abel Mehula, un joli endroit où les montagnes courent plus directement vers le nord, c'est la patrie d'Elisée. La ville s'étend au delà d'une arête de montagnes et je remarquai une grande différence de fertilité entre le côté du nord et celui du midi. Les habitants étaient assez bons. Ils avaient oui parler des miracles de Jésus à Kibza'm et à Thébez. ils l'arrêtèrent sur le chemin et ils témoignèrent le désir qu'il voulût bien rester chez eux et y guérir les malades. Il y eut presque une émeute. Jésus ne s'arrêta pas longtemps. Je crois que cet endroit était à environ quatre lieues de Thébez. Jésus passa près de Scythopolis et du Jourdain.
Lorsque Jésus fut parti d'Abel Mehula, André, Pierre et Jean, pendant que leurs autres amis étaient déjà à Gennabris, vinrent à la rencontre du Seigneur près d'une petite ville, qui est à peu près à six lieues de Tibériade. Pierre était venu avec Jean pêcher dans les environs. Ils voulaient d'abord se rendre à Gennabris ; mais André leur persuada d'aller d'abord à la rencontre du Seigneur. André conduisit son frère à Jésus, qui lui dit entre autres choses : " Tu es Simon, fils de Jonas ; à l'avenir tu t'appelleras Céphas (Joan., i, 41 42). " Il lui adressa tout d'abord ces paroles et ne s'entretint que peu de temps avec lui. à Jean qu'il connaissait déjà depuis longtemps, il dit qu'ils se reverraient bientôt. Là dessus Pierre et Jean partirent pour Gennabris. André resta près de Jésus : je crois qu'ils restèrent dans cet endroit qui pouvait être à douze lieues de Thébez.
Ce même jour, elle dit que Jean Baptiste avait quitté le lieu où il baptisait en deçà du Jourdain, qu'il avait passé le fleuve et s'était remis à baptiser à environ une lieue de Bethabara, à l'endroit où Jésus avait fait baptiser récemment et où lui même avait aussi baptisé précédemment. Elle avait oublié le nom d'un endroit voisin et se rappelait seulement la syllabe ma. Ce qui a surtout décidé Jean à baptiser là, c'est que beaucoup de gens du pays du tétrarque Philippe, qui était un bon prince, voulaient se faire baptiser ; mais ils ne passaient pas volontiers le Jourdain, surtout lorsqu'ils devaient se trouver en compagnie de beaucoup de pa'ens : du reste, le séjour de Jésus dans cette contrée avait excité, chez beaucoup de personnes, le désir du baptême. Ce fut aussi pour montrer qu'il ne se séparait pas de Jésus que Jean vint baptiser au même endroit que lui.
(25 26 décembre.) Jésus vint aujourd'hui à peu de distance de Tarichée, dans une maison appartenait à la pêcherie et voisine du lac. Je crois qu'on y vendait ou qu'on y salait les poissons. André y avait déjà retenu un logement, ou peut être dépendait elle de la pêcherie affermée par Pierre. Jésus n'entra pas dans la ville, les habitants avaient quelque chose de farouche et de repoussant : ils ne pensaient qu'au gain et à l'usure. Simon, qui avait un emploi dans cette ville (cananeus, zélateur, c'était comme un défenseur des droits du commerce), était allé à Gennabris pour la fête avec Thaddée et Jacques le Mineur, ses frères : Jacques le Majeur y était aussi : Lazare, Saturnin et le fils de Siméon vinrent ici trouver Jésus, ainsi que le fiancé de Cana. Celui ci invita à ses noces Jésus et tous ses compagnons. Le soir, Jésus pria et célébra, dans la maison où il était, la fête des lumières.
(06 décembre.) Dans la journée, Jésus alla avec quelques disciples dans les montagnes du voisinage. Il s'y trouvait des grottes dans quelques endroits, il se retira à part et pria seul. Le matin et le soir ; il pria à la maison : dans la soirée, il célébra la fête de la dédicace du temple en allumant des flambeaux. La principale raison qu'eut Jésus pour s'arrêter ces deux jours près de Tarichée fut qu'il voulait laisser à ceux qui devaient devenir ses apôtres et ses disciples le temps de se communiquer les bruits qu'ils avaient recueillis ou ce qui leur avait été raconté par André et Saturnin et de s'entendre entre eux à ce sujet.
Je vis aussi qu'André pendant que Jésus parcourait les environs, resta à la maison et écrivit des lettres avec un roseau sur des bandes d'écorce, à ce que je crois : on pouvait les replier et les dérouler au moyen d'un morceau de bois fendu. Il vint dans la' maison des hommes et aussi des jeunes gens qui cherchaient du travail et André les employait comme messagers. Il envoya les lettres qu'il avait écrites d'une part à Philippe et à son demi frère Jonathan, d'autre part à Pierre et aux autres qui étaient à Gennabris : il leur annonçait que Jésus irait à Capharnaum pour le sabbat et il les engageait à s'y rendre.
Jésus ne serait peut être allé à Capharnaum que le vendredi 28, mais il vint de cette ville un message adressé à André, pour qu'il suppliât Jésus de s'y rendre, vu qu'un messager venu de Kadés pour implorer son assistance, l'y attendait depuis plusieurs jours. Le fiancé Nathanaël était déjà reparti avec quelques disciples de Jean.
(27 décembre.) Capharnaum n'est pas tout contre le lac, mais sur la hauteur, sur le côté méridional d'une montagne qui forme une vallée au couchant du lac, à l'endroit où le Jourdain s'y jette. Bethsa'de est un peu au dessus de l'entrée du Jourdain dans le lac. Aujourd'hui Jésus accompagné d'André, de Saturnin et de quelques autres disciples de Jean, alla de la maison de pêcheur voisine de Tarichée à Capharnaum. ils cheminaient par groupes séparés.
Ils prirent à l'est de Magdalum la route voisine du lac, arrivèrent par la vallée devant Capharnaum et laissèrent Bethsa'de à droite. André rencontra en chemin son demi frère Jonathan et Philippe qui, je crois, étaient venus au devant de lui par suite de son message. Toutefois ils ne se réunirent pas à Jésus sur ce chemin. Ils allèrent avec André en avant ou en arrière de Jésus, ce dont je ne me souviens plus bien. J'entendis seulement André leur parler d'un ton très animé et pour raconter tout ce qu'il avait vu de Jésus : il leur dit que c'était vraiment le Messie, que, s'ils voulaient le suivre, ils n'avaient pas besoin de le lui demander, qu'ils devaient seulement s'examiner pour savoir s'ils le désiraient du fond du coeur, et qu'alors il indiquerait par un signe ou par un mot s'il les admettait.
Les saintes femmes et Marie n'étaient pas à Capharnaüm, mais chez Marie, dans la vallée qui est en avant de Capharnaum en face du lac, et elles y célébraient la fête. Les fils de Marie de Cléophas, Jacques le Majeur, Jean son frère et Pierre étaient déjà arrivés là de Gennabris, comme aussi les fils des trois veuves et d'autres futurs disciples. Khased (Nathanaël), Thomas, Barthélémy et Matthieu n'étaient pas là. Il s'y trouvait du reste plusieurs autres parents et amis de la sainte Famille, qui tous étaient invités à Cana pour les noces et qui célébraient ici le sabbat parce qu'ils avaient entendu parler de l'arrivée de Jésus.
Jésus logeait avec André, Saturnin, quelques disciples, Lazare et Obed, dans une maison qui appartenait à Nathanaël le fiancé. Il y avait sur le devant une salle ouverte : les appartements étaient sur le derrière. Les parents de Nathanael ne vivaient plus : ils lui avaient laissé du bien. Cette maison lui appartenait et il y résidait quand il avait des affaires à Capharnaum.
Les futurs disciples venus de Gennabris se tenaient encore à distance avec une certaine crainte ; car d'une part, ils hésitaient entre l'autorité qu'avait auprès d'eux le jugement de Nathanaël Khased, et les grandes choses qu'André et les autres disciples de Jean leur avait dites de Jésus. D'autre part la timidité les retenait et aussi ce qu'André leur avait dit, qu'ils n'avaient pas besoin de s'offrir, qu'ils devaient seulement écouter ses enseignements qui ne manqueraient pas de produire sur eux leur effet. Les fils de Cléophas, ceux qu'on appelait les frères de Jésus, allèrent le trouver. Il enseigna et parla dans la salle antérieure.
L'homme qui avait attendu Jésus pendant deux jours, vint le trouver ici. Il se jeta a ses pieds et dit qu'il était le serviteur d'un homme de Cadès. Son maître suppliait Jésus de venir guérir son petit garçon qui avait la lèpre et qui était possédé d'un démon muet. Cet homme était un serviteur très fidèle et il exprima la douleur de son maître en homme qui prenait une grande part. Jésus lui répondit qu'il ne pouvait pas aller avec lui, qu'il fallait pourtant venir en aide à ce petit garçon, car c'était un enfant innocent.
Il dit au serviteur qu'il fallait que son maître se couchât sur son fils les bras étendus et fît une certaine prière ; qu'alors la lèpre se retirerait de lui : que lui, le serviteur, devait après cela s'étendre à son tour sur l'enfant et lui souffler dans la bouche : qu'alors une vapeur bleuâtre sortirait de l'enfant qui recouvrerait la faculté de parler. J'ai oublié ce qu'il lui dit de plus, mais j'ai vu le père et le serviteur guérir l'enfant de la manière indiquée.
L'ordre était donné au père et au serviteur de s'étendre sur l'enfant malade pour certaines raisons cachées dont je ne me souviens plus bien clairement. Cet enfant n'était pas né d'une union légitime ; il semblait qu'il fût le fils du serviteur et de la femme de son maître, sans que celui-ci le sût. Mais Jésus le savait. Chacun d'eux devait prendre une dette de 1'enfant. Je ne puis pas expliquer cela clairement, non plus que la manière mystérieuse dont cela se fit. La ville de Cadès(2) était à environ six lieues au nord de Capharnaum, près des confins de Tyr, à l'ouest de Panéas : c'était une ancienne capitale des Chananéens, et maintenant une ville libre où des gens poursuivis par la justice se réfugiaient. Elle confinait à un pays appelé Kaboul qui avait été donné par Salomon au roi des Phéniciens. Ce pays m'apparaît ordinairement avec quelque chose de sombre, d'obscur et de sinistre, et j'ai toujours vu Jésus l'éviter quand il allait du côté de Tyr et de Sidon. Je crois qu'il s'y commettait beaucoup de vols et d'assassinats.
(28 29 décembre.) Le jour du sabbat, je vis et j'entendis Jésus enseigner dans la synagogue. Il y avait une foule énorme : tous les amis et les parents de Jésus étaient là. Son enseignement était tout à fait nouveau pour ses auditeurs et les remuait singulièrement. Il parla de l'approche du royaume de Dieu, de la lumière qu'on ne doit pas mettre sous le boisseau, du semeur, de la foi comparée à un grain de sénevé. Ce n'étaient pas seulement ces paraboles, telles que nous les connaissons : c'en était une exposition toute différente. Les paraboles n'étaient que des exemples ou des comparaisons présentées en peu de mots, dont il prenait occasion pour développer sa doctrine. J'ai entendu dans ses instructions plus de paraboles qu'on n'en trouve dans l'Evangile, mais cette fois c'étaient les mêmes qu'il répétait souvent, en les commentant chaque fois d'une manière différente. Le samedi, il enseigna de la même façon jusqu'à la clôture du sabbat.
Note 2: Cadès ou Kedès de Nephtali s'appelait Cidissus au temps de saint Jérôme.
Lorsque le sabbat fut fini, je vis Jésus passer près de la synagogue et aller dans une petite vallée avec ses disciples. C'était un endroit retiré, comme un lieu de promenade : il y avait des arbres devant l'entrée et dans la vallée. Les fils de Marie de Cléophas, ceux de Zébédée et d'autres disciples se joignirent à lui ; mais Philippe, qui était humble et timide, hésitait, restait en arrière et ne savait pas s'il devait le suivre dans la vallée. Alors Jésus qui marchait en avant tourna la tête vers lui et lui dit : "Suis moi ! " (Joan. I, 43) ; et Philippe, tout joyeux, se joignit aux autres : ils étaient environ une douzaine.
Jésus enseigna dans cet endroit, près d'un arbre ; il parla de l'appel qu'il adressait à ceux qui devaient le suivre et de ce qu'ils avaient à faire. André, qui était extraordinairement zélé et enthousiaste, qui avait persuadé les autres, comme il l'était lui même, que Jésus était le Messie, et qui se réjouissait du grand effet qu'avait produit sur eux tous l'enseignement de Jésus le jour du sabbat, avait le coeur si plein. qu'à chaque occasion qui se présentait il certifiait encore à ses compagnons ce qu'il avait vu au baptême de Jésus et ses autres miracles.
J'entendis aussi Jésus prendre le Ciel à témoin qu'ils verraient de plus grandes choses encore, et parler au Père céleste de sa mission.
Il parla encore de ce qu'ils auraient à faire pour le suivre, leur dit qu'ils devaient se tenir prêts, et tout quitter quand il les appellerait. Il ajouta qu'il prendrait soin d'eux tous et qu'ils ne manqueraient de rien, qu'ils pouvaient continuer à exercer leur profession, car il avait encore quelque chose à faire pour les prochaines fêles de Pâques : mais que quand il les appellerait t ils devraient le suivre sans s'inquiéter de rien. il donna ces explications sur ce que ceux qui étaient là lui demandèrent en toute simplicité ce qu'ils auraient à faire vis à vis de leurs familles. Ainsi, par exemple, Pierre représenta qu'il ne pouvait pas quitter immédiatement son vieux beau père (oncle de Philippe) : Toutefois Jésus leva tous ces scrupules en déclarant qu'il ne commencerait pas avant la fête de Pâques. Il leur dit qu'ils devaient dès à présent renoncer à leur profession, en tant que leur coeur y était attaché ; qu'ils pouvaient la continuer extérieurement jusqu'à ce qu'il les appelât, et en attendant mettre leurs affaires en état d'être remises en d'autres mains. Il alla ensuite avec eux à l'extrémité opposée de la vallée et se rendit à l'habitation de sa mère, qui faisait partie d'un groupe de maisons situées entre Capharnaum et Bethsa'de. Ses plus proches parents l'y suivirent : leurs mères étaient aussi là.
Pendant tout ce temps, l'état de maladie de la narratrice rendit les communications rares et incomplètes : elle se crut souvent au moment de mourir. Son dépérissement était incroyable Ses mains et ses pieds n'étaient qu'une charpente osseuse recouverte d'une peau flasque.
( 30 décembre. ) Le 30, Jésus partit de très bonne heure pour Cana avec ses disciples et ses parents. Marie et les autres femmes prirent de leur côté un chemin plus direct et plus court : c'était un étroit sentier qui passait plus souvent par la montagne Les femmes suivaient de préférence des chemins de ce genre, parce qu'elles y rencontraient moins de monde : du reste, elles n'avaient pas besoin d'un chemin bien large : car elles marchaient ordinairement à la suite les unes des autres. Le guide les précédait à quelque distance : un autre les suivait. Ce chemin allait à environ sept lieues de Capharnaum, dans la direction du sud ouest.
Jésus passa par Gennabris avec ses compagnons et fit un détour. Ce chemin était plus large et plus commode pour enseigner en marchant, car souvent Jésus s'arrêtait pour indiquer et expliquer quelque chose. La route que suivait Jésus allait plus au midi que celle que suivait Marie ; elle conduisait à Gennabris, qui est à environ six lieues de Capharnaum, puis elle tournait au couchant vers Cana, ce qui faisait encore trois lieues.
Gennabris était une belle ville. Il y avait une école et une synagogue ; il s'y trouvait en outre une école de rhétorique et on y faisait beaucoup de commerce. Nathanaël exerçait ses fonctions d'écrivain dans une grande maison en avant de la ville ; il y avait là quelques autres maisons. Nathanaël n'alla pas à la ville, quoique les disciples, ses amis, l'y engageassent. Jésus enseigna ici dans la synagogue et il mangea quelque chose avec une partie de ses disciples chez un riche pharisien. Quelques autres disciples étaient allés en avant. Jésus avait dit à Philippe d'aller trouver Nathanael et de le lui amener sur le chemin.
Jésus fut traité avec beaucoup d'égards à Gennabris ; les habitants désiraient qu'il restât plus longtemps avec eux et qu'il prît pitié de leurs malades ; il était à certains égards leur compatriote, disaient ils ; mais il repartit bientôt pour Cana.
Pendant ce temps, Philippe était allé trouver Nathanaël à son bureau. Il y avait là plusieurs écrivains ; il était assis dans une pièce qui était au haut de la maison. Philippe n'avait pas encore parlé de Jésus à Nathanaël, parce qu'il n'était pas avec les autres à Gennabris. Il était en bons termes avec lui, et il lui dit avec beaucoup d'enthousiasme et de joie que Jésus était le Messie annoncé par les prophéties ; que ce Messie, ils l'avaient trouvé dans la personne de Jésus de Nazareth, fils de Joseph.
Nathanaël était un homme vif et d'un caractère ouvert, mais néanmoins ferme et tenace dans ses opinions, d'ailleurs plein de droiture et de sincérité. Il dit à Philippe : "Que peut il venir de bon de Nazareth ? " car il connaissait bien la réputation des gens de Nazareth : il savait qu'il régnait dans leurs écoles un grand esprit de contradiction et qu'on n'y trouvait guère de sagesse. Il pensait qu'un homme qui avait fait là son éducation, pouvait bien plaire à ses amis, gens simples et bienveillants, mais le contenterait plus difficilement, lui qui avait des prétentions au savoir. Philippe lui dit de venir et de voir qui était Jésus, ajoutant qu'il allait passer près de là, sur le chemin de Cana. Alors Nathanaël descendit avec Philippe et prit un chemin très court sur lequel était située la maison, à quelque distance de la grand route de Cana ; cependant Jésus s'arrêta avec quelques disciples à l'endroit où ce chemin aboutissait à la grand route. Philippe, depuis que Jésus l'avait appelé, était aussi joyeux et aussi confiant qu'il avait été craintif auparavant ; il dit à haute voix pendant qu'il approchait de Jésus avec Nathanaël : "Maître, j'amène celui qui demandait s'il peut venir quelque chose de bon de Nazareth. "Mais, lorsque Nathanaël fut en sa présence, Jésus dit aux disciples qui étaient près de lui : "Voici un véritable israélite, chez lequel il n'y a pas d'artifice (Joan 1, 45,51). ' " Jésus dit cela d'un ton très amical et très affectueux, et Nathanaël répondit : "D'où me connaissez vous ? " il voulait dire par là : Comment savez vous que je suis sincère et sans artifice, puisque nous ne nous sommes jamais parlé ? Alors Jésus lui dit : " Avant que Philippe t'appelât je t'ai vu sous le figuier. " Et en parlant ainsi Jésus le regarda d'une manière très touchante et très significative.
Ce regard réveilla tout à coup chez Nathanaël le souvenir que Jésus était ce même passant dont le regard sérieux l'avait prémuni et lui avait communiqué une merveilleuse force de résistance, lorsqu'étant sous un figuier dans le jardin de plaisance des bains de Bethulie (voyez ci dessus, page 147.), il avait lutté contre la tentation après avoir regardé de belles femmes qui jouaient avec des fruits au bord de la prairie. La puissance de ce regard et la victoire dont il lui avait été redevable, lui étaient restées présentes à l'esprit ; il n'en était peut être pas de même de la figure de cet homme, on bien, s'il avait immédiatement reconnu Jésus, il ne pouvait pourtant pas croire qu'il eût eu cette intention en le regardant. Mais maintenant que Jésus faisait une allusion directe à cette circonstance et lui lançait de nouveau un regard pénétrant, il fut tout bouleversé et saisi d'une vive émotion ; il sentit que Jésus, lorsqu'il avait alors passé devant lui, avait vu ses pensées et avait été pour lui un ange gardien, car il avait le coeur si pur qu'une mauvaise pensée le troublait beaucoup. il vit aussitôt dans Jésus son protecteur et son sauveur, et cette connaissance que Jésus avait eue de ses pensées suffit à son coeur sincère, prompt et reconnaissant, pour le décider à lui rendre hommage devant tous les disciples. Il s'humilia donc devant lui lorsqu'il eut prononcé ces paroles et lui dit :
" Maître, vous êtes le Fils de Dieu, vous êtes le Roi d'Israël. " Alors Jésus lui répondit : "Tu crois déjà, parce que j'ai dit que je t'avais vu sous le figuier ; en vérité tu verras de plus grandes choses que cela. '' Et il ajouta, s'adressant à tous avec affirmation : " En vérité, en vérité, vous verrez le ciel s'ouvrir et les anges de Dieu montant et descendant sur le Fils de l'homme. " Les autres disciples ne comprirent pas clairement le sens des paroles de Jésus sur le figuier, et ils ne savaient pas pourquoi Nathanaël Khased changeait si promptement de sentiment. La chose, comme affaire de conscience, resta cachée pour tous, excepté pour Jean à qui Nathanaël la confia aux noces de Cana. Nathanaël demanda à Jésus s'il devait tout quitter aussitôt pour le suivre, disant qu'il avait un frère auquel il voulait transmettre son office. Jésus lui répéta ce qu'il avait dit aux autres le soir du jour précédent et l'engagea à l'accompagner aux noces de Cana.
Jésus et les disciples continuèrent alors leur route vers Cana, et Nathanaël Khased revint chez lui faire ses préparatifs pour se rendre aux noces ; il arriva à Cana le lendemain dans la matinée. Les parents de la fiancée, Marie, le fiancé et d'autres personnes encore vinrent à la rencontre de Jésus, sur le chemin en avant de Cana et le reçurent tous respectueusement.
CH. 7 - Noces de Cana
CHAPITRE SEPTIEME.
Noces de Cana.
(Du 31 décembre au 5 janvier 1822.)
(3 décembre.) Jésus logea avec ses disciples les plus intimes, et notamment avec ceux qui plus tard furent ses apôtres, dans une maison à part où Marie avait aussi logé lors de son premier séjour. Cette maison appartenait à la tante du fiancé, laquelle était fille de Sobé, soeur de sainte Anne. C'était l'une des trois veuves dont il a été parlé plusieurs fois : celle d'entre elle qui avait trois fils. Pendant toute la cérémonie elle tint la place de la mère du fiancé.
Ce jour là tous les autres conviés des deux sexes arrivèrent : tous les parents de Jésus vinrent de Galilée. Jésus seul amena vingt cinq de ses disciples. Le mariage était regardé par lui comme une affaire qui le touchait personnellement, et il s'était chargé des frais d'une partie des fêtes qui devaient l'accompagner. C'était pour cela que Marie était allée si tôt à Cana où elle aidait à faire les préparatifs. Entre autres choses, Jésus s'était chargé de fournir tout le vin pour les noces : voilà pourquoi Marie lui dit avec tant de sollicitude que le vin manquait.
Quoique Jésus, âgé de douze ans, lors du banquet donné aux enfants chez sainte Anne après son retour du temple, eût dit au fiancé, après quelques paroles mystérieuses sur le pain et le vin, qu'il assisterait un jour à ses noces, cet événement avec sa haute et mystérieuse signification, a pourtant aussi ses causes extérieures, prises en apparence dans la marche ordinaire des choses. Il en est de même de la part prise par Jésus à ces noces. Marie avait déjà envoyé plusieurs messagers à Jésus pour le prier de venir à ces noces : on tenait, ainsi qu'il arrive fréquemment parmi les hommes, des propos contre Jésus dans sa famille et parmi ses connaissances : sa mère, disait on, était une veuve délaissée : il courait à droite et à gauche dans le pays et ne s'inquiétait pas d'elle ni de sa famille. C'est pour cela qu'il voulut venir à ces noces avec ses amis et faire honneur à ce mariage. C'est pourquoi aussi il avait fait venir Marthe et Lazare pour aider Marie dans ses arrangements, et Lazare faisait cette partie des frais dont Jésus s'était chargé, ce qui n'était su que de Jésus et de Marie, car le Sauveur avait une grande confiance dans Lazare ; il acceptait volontiers ses dons, et celui ci de son côté était heureux de tout donner. Jésus s'était chargé de fournir une partie du festin, c'était un second service composé de plats recherchés, de fruits, d'oiseaux et d'herbes de toute espèce. Il avait été pourvu à tout cela. Je vis aussi Véronique arriver de Jérusalem et porter à Jésus une corbeille remplie de fleurs magnifiques et toute espèce de sucreries artistement préparées.
Le père de la fiancée était un homme aisé, il dirigeait une grande entreprise de transports ; il avait le long de la grande route des magasins, de vastes hôtelleries et des étables pour les caravanes, et il employait beaucoup de monde.
Ces jours ci, Jésus s'entretint souvent en particulier avec les disciples qui furent plus tard ses apôtres et qui étaient logés dans la même maison que lui. Les autres disciples n'étaient pas présents à tout ce qu'il leur disait. Ils se promenaient beaucoup dans les environs ; alors Jésus faisait différentes instructions aux disciples et aux conviés, et les futurs apôtres communiquaient à leur tour aux autres les enseignements qu'ils avaient reçus de lui. Ces promenades que faisaient les conviés donnèrent plus de facilité pour faire les préparatifs de la fête sans dérangements : cependant plusieurs disciples et Jésus lui même étaient souvent dans la maison et s'occupaient à disposer ceci ou cela, d'autant plus que plusieurs d'entre eux devaient avoir quelque chose à faire dans la cérémonie nuptiale.
Jésus voulait à cette fête se faire connaître de tous ses parents et amis : il voulait que tous ceux qu'il avait choisis jusqu'alors fissent connaissance entre eux et avec les siens, ce à quoi se prêtait la grande liberté de rapports qui s'établit dans une fête.
Les noces commencent le soir du troisième jour après l'arrivée de Jésus. Les épousailles doivent avoir lieu le mercredi matin. Les fêtes de la dédicace du temple finissent ce soir.
(1er janvier 1821.) Remarque préliminaire. La Soeur fut ces jours ci très souffrante et très dérangée et elle oublia beaucoup de choses. Quand elle a l'esprit tout occupé d'une scène qu'elle a vue et qu'elle en a dit quelque chose, elle croit plus tard avoir tout raconté, car quand elle souffre d'une grande fatigue qui remonte à un moment antérieur, elle se figure que cette fatigue vient de ce qu'elle a beaucoup raconté, tandis que souvent on n'a presque rien recueilli. Aussi n'a t on souvent, comme c'est ici le cas, que de simples fragments.
C'était aujourd'hui le deuxième jour depuis l'arrivée de Jésus à Cana. Il y avait cent conviés, parmi lesquels Marie, mère de Marc, Jean Marc, et Véronique qui paraissait plus âgée que Marie. Suzanne de Jérusalem n'était pas ici : alors, comme plus tard, elle voyageait rarement avec les autres : elle menait une vie élégante, mais assez retirée, à cause de son origine. Les parents de Jacques et de Jean étaient ici, mais non ceux de Pierre et d'André. Leur demi frère Jonathan, était présent ainsi que celles qu'on appelait les trois veuves avec leurs fils, en général tous les parents de sainte Anne, spécialement ses nièces et ses petits enfants, Marie de Cléophas avec ses fils, la fille cadette d'Anne, demi soeur de la sainte Vierge, les neveux de Joseph d'Arimathie, Obed, et quatre disciples de Jean, Cléophas, Jacques, Jude et Japhet, compagnons d'enfance de Jésus, et petits fils de Sabadias de Nazareth, parent de Joachim.
Le père de la fiancée s'appelle Israël. Je ne voulais pas redire ce nom, parce que je ne croyais pas que personne s'appelât ainsi. Il descend de Ruth de Bethléhem. La mère de la fiancée est un peu infirme : elle boîte d'un côté et on la soutient. Cana est un peu plus petit que Capharnaum : cette dernière ville est plus vivante, mais moins grande que Nazareth, dont quelques parties sont en ruines. Cana est situé sur le côté occidental d'une colline : c'est un endroit agréable et propre : cependant il n'y a de gens riches qu'Israël et deux autres personnes, le reste semble vivre de son travail et être à la solde de ceux ci. Il y a une synagogue avec trois prêtres. Les noces se célèbrent dans une maison destinée aux fêtes publiques et voisine de la synagogue. Entre cette maison et la synagogue on a dresse des arcades de feuillage, ornées de guirlandes et de fruits. Devant la maison où doit se donner la fête, il y a un vestibule jonché de feuillage : la salle du banquet est contiguë : c'est la pièce antérieure de la maison, vide jusqu'au foyer qui consiste en un mur élevé avec des degrés, où pourtant on ne fait rien cuire, mais qui est orné comme un autel avec des vases, des fleurs, de la vaisselle de table et d'autres objets. Derrière ce foyer se trouve une autre partie de la salle qui en occupe à peu près le tiers. C'étaient là que se tenaient les femmes pendant le repas. On voyait au plafond les poutres de la maison : elles étaient ornées de guirlandes et on pouvait y monter pour allumer les lampes qui s'y trouvaient.
Jésus est comme le roi de la fête, il préside à tous les divertissements et les assaisonne par des instructions. il leur a dit qu'ils devaient, pendant ces jours, se récréer conformément à l'usage établi, et, tout en se réjouissant, tirer de tout de sages enseignements. il régla, en outre, toute l'ordonnance de la fête, et dit, entre autres choses, qu'il faudrait sortir deux fois par jour pour se récréer en plein air.
Je vis ensuite les invités à la noce, les hommes d'un côté, les femmes de l'autre, se livrer au plaisir de la conversation et jouer à divers jeux, sous les arbres d'un lieu de plaisance : il y avait de l'eau dans le voisinage. Je crois que c'était un jardin d'agrément près duquel l'on prenait des bains. Je vis les hommes couchés par terre en cercle ; au milieu d'eux étaient des fruits de toute espèce qu'ils jetaient et faisaient rouler suivant certaines règles, de manière à ce qu'ils tombassent dans des fosses qui se trouvaient au milieu d'eux, ce que quelques uns d'entre eux tâchaient d'empêcher.
Je vis Jésus prendre part à ce jeu des fruits avec une gravité bienveillante : il disait souvent avec un sourire quelque chose d'instructif que les uns admiraient, que d'autres recueillaient avec une émotion silencieuse, ou que quelques uns ne comprenaient pas bien et se faisaient expliquer par de plus intelligents Il avait arrange les parties de jeu et réglé les enjeux, et il faisait a chacun sa part, accompagnant tout ce qu'il faisait de remarques pleines d'agrément et souvent tout à fait admirables.
Les plus jeunes des assistants couraient et sautaient par dessus les barrières de feuillage pour gagner des fruits. Les femmes étaient assises à part et jouaient aussi avec des fruits, la fiancée était toujours assise entre Marie et la tante du fiancé.
Le soir du premier janvier, commencement du quatrième jour du mois de Thébet, Jésus enseigna dans la synagogue où tous étaient rassemblés : il parla des divertissements permis, de leur signification, de la mesure dans laquelle on devait les prendre, du sérieux et de la sagesse qui devaient les accompagner : puis ensuite du mariage, de l'homme et de la femme ; de la continence, de la chasteté et du mariage spirituel. Quand il eut fini d'enseigner, les fiancés vinrent seuls se présenter devant lui et il leur donna des instructions particulières.
Les noces commencèrent ensuite par un repas et par des danses. On dansait aux sons d'une musique faite par des enfants qui de temps en temps chantaient des choeurs. Tous les danseurs avaient à la main des mouchoirs avec lesquels les hommes et les jeunes filles se touchaient quand ils dansaient en rang ou en cercle ; à cela près, ils ne se touchaient jamais. Les mouchoirs du fiancé et de la fiancée étaient noirs, ceux des autres étaient jaunes. Le fiancé et la fiancée dansèrent d'abord seuls, puis tous dansèrent ensemble : les jeunes filles étaient voilées, toutefois le voile était un peu relevé sur je visage ; leurs vêtements étaient longs par derrière, et un peu retroussés sur le devant avec des cordons. On ne se trémoussait pas et on ne sautillait pas comme on fait chez nous quand on danse : c'était plutôt une marche dans différentes directions, accompagnée de mouvements des mains, de' la tète et du corps d'accord avec la musique. Cela me rappela les mouvements des juifs de la secte pharisienne dans leurs prières : mais tout y était gracieux et décent. Aucun des futurs apôtres ne prit part aux danses : mais Nathanaël Khased, Obed, Jonathan et d'autres disciples s'y mêlèrent. Il n'y avait, en fait de danseuses, que des jeunes filles : tout se faisait avec un ordre admirable, et respirait une joie paisible.
(2 janvier.) Ce matin vers neuf heures eurent lieu les épousailles. La fiancée avait été habillée par les demoiselles d'honneur : son vêtement ressemblait à celui que portait la Mère de Dieu lors de son mariage ; il en était de même de sa couronne qui était seulement plus riche. Sa chevelure n'était pas partagée en lignes minces et séparées, mais en tresses plus épaisses. Quand sa toilette fut finie, elle fut présentée à la sainte Vierge et aux autres femmes.
Le fiancé et la fiancée furent conduits de la synagogue à la maison de fête et de là ramenés à la synagogue. Il y avait dans le cortège six petits garçons et six petites filles qui portaient des guirlandes, puis six garçons et six filles plus âgés avec des flûtes et d'autres instruments que j'ai décrits ailleurs. De plus, la fiancée était accompagnée de douze jeunes filles comme demoiselles d'honneur, et le fiancé de douze jeunes hommes. Parmi ceux ci se trouvaient Obed fils de Véronique, les neveux de Joseph d'Arimathie, Nathanaël Khased et quelques disciples de Jean, mais aucun des futurs apôtres.
Les épousailles se firent devant la synagogue par le ministère des prêtres. Les anneaux qu'ils échangèrent étaient un présent que Marie avait fait au fiancé, et Jésus les avait bénits chez sa mère. une circonstance qui me frappa et que je n'avais pas observée lors des épousailles de Joseph et de Marie, fut que le prêtre piqua le fiancé et la fiancée avec un instrument pointu à la place du doigt annulaire de la main gauche où devait être mis l'anneau. Il fit tomber deux gouttes du sang du fiancé et une goutte de celui de la fiancée dans un verre de vin où ils burent en commun, après quoi ils rendirent le verre. On distribua différents objets, tels que des pièces d'étoffe et des vêtements aux pauvres qui assistaient à la cérémonie. Lorsque les fiancés furent ramenés à la maison de fête, ils furent reçus par Jésus.
Avant le repas de noce, je vis tout le monde rassemblé dans le jardin d'agrément : les femmes et les jeunes filles étaient assises sur des couvertures dans une cabane de feuillage, et elles jouaient à un jeu où l'on gagnait des fruits. Elles mettaient tour à tour sur leurs genoux une petite planche triangulaire avec des lettres écrites sur le bord : elles tournaient un indicateur placé sur cette planche et leur gain se réglait Suivant l'endroit ou il s'arrêtait.
Quant aux hommes, je vis un jeu très curieux que Jésus lui même avait préparé pour eux dans une maison de plaisance. Au milieu d'une salle était une table ronde autour de laquelle étaient rangées autant de portions de fleurs, de plantes et de fruits qu'il y avait de joueurs. Jésus avait disposé tout cela d'avance, et chaque chose avait une signification d'un sens profond. Sur cette table était un disque rond et mobile avec une entaille : quand on le faisait tourner, l'entaille en s'arrêtant désignait une des portions de fruits et celui qui avait fait tourner la gagnait comme son lot. Au milieu de la table était placé un cep de vigne chargé de raisins s'élevant au dessus d'une gerbe d'épis de blé qui l'entourait, et plus la table tournait longtemps, plus le cep de vigne et le bouquet d'épis montaient haut. Les futurs apôtres ne prirent point part à ce jeu non plus que Lazare. Il me fut indiqué à cette occasion, que celui qui est appelé à enseigner les autres ou qui sait quelque chose de plus qu'eux, ne doit pas jouer lui même, mais seulement observer les accidents du jeu, les relever par des applications instructives et donner ainsi à l'amusement un tour sérieux. Il y avait dans ce jeu disposé par Jésus quelque chose de tout à fait merveilleux et qui était plus que du hasard, car le lot qui échut à chacun des joueurs avait un rapport très significatif avec ses qualités, ses défauts et ses vertus, et lorsque les fruits eurent été classés, Jésus fit à chacun un commentaire sur son lot. Chaque lot fut comme une parabole relative à celui qui le gagnait, et je sentis qu'en effet avec ces fruits, ils recevaient intérieurement quelque chose. Chacun d'eux fut vivement touché et réveillé par les paroles de Jésus, et peut être aussi parce que ces fruits qu'ils mangèrent opéraient réellement en eux un effet conforme à leur signification ; toutefois ce que Jésus dit sur chaque lot ne fut pas compris par ceux que la chose ne regardait pas : ils n'y virent que des paroles encourageantes et significatives. Mais chacun en particulier sentit le regard du Seigneur pénétrer profondément dans son intérieur : il en fut comme des paroles de Jésus à Nathanaël lorsqu'il lui dit qu'il l'avait vu sous le figuier, paroles qui le touchèrent si profondément et dont le sens resta caché aux autres. (Malheureusement la Soeur ne peut rien raconter de plus sur le détail des lots et sur les explications données par Jésus.)
Je me souviens encore qu'il y avait du réséda parmi les plantes, et aussi que Jésus dit à Nathanaël à l'occasion de son lot : " Vois tu maintenant combien j'avais raison de dire que tu es un véritable Israélite sans artifice ? "
Je vis un de ces lots produire un effet vraiment merveilleux. Le fiancé Nathanaël gagna un fruit d'une singulière espèce. Il y en avait deux sur une tige avec des sexes différents comme dans le chanvre. L'un des fruits était assez semblable à une figue, l'autre ressemblait plutôt à une pomme entaillée : toutefois il n'avait pas de tête, il était creux. C'est difficile à expliquer, c'était comme un nombril : il y avait dedans des capsules contenant la semence, au nombre de deux, glacées l'une au dessus de l'autre : il se trouvait, je vis, quatre noyaux dans l'une et trois dans l'autre : au dessus croissaient en dehors de beaux filaments blancs. Ce fruit était rougeâtre, blanc à l'intérieur, et veiné de rouge : j'en ai vu de semblables dans le Paradis.
(Telle fut à peu près sa description vague et embrouillée de ce fruit, dans laquelle il semble qu'elle parle tantôt du fruit lui même, tantôt de la fleur, tantôt de tous deux en même temps.)
Je me souviens seulement que tous furent très étonnés quand le fiancé gagna ce fruit, que Jésus parla alors du mariage, de la chasteté et du produit centuple de la chasteté, et que tout cela fut dit de manière à ne point blesser les idées des juifs sur le mariage. Toutefois, quelques uns des disciples qui étaient Esséniens, et dont était Jacques le Mineur, le comprirent mieux que les autres.
Je vis que les assistants s'étonnèrent plus à propos de ce lot qu'à propos des autres, et que Jésus dit à peu près que ces lots et que ces fruits pouvaient opérer des merveilles encore plus grandes que leur signification ne paraissait merveilleuse. Mais lorsque le fiancé retira ce lot pour lui et sa fiancée, je vis arriver quelque chose de tout à fait surprenant que je n'ose presque pas raconter. Et je vis, lorsqu'il reçut ce lot, ressentir une commotion intérieure et pâlir : alors quelque chose comme une sombre figure humaine, ou comme une ombre, sortit de lui en remontant de ses pieds à sa tête, et disparut ; après quoi, je vis en lui une clarté, une pureté et comme une transparence qui n'y étaient pas auparavant. Personne ne sembla voir cela excepté moi, car tous restèrent calmes comme avant, et il n'y eut aucun mouvement parmi eux. Au même instant, je vis aussi la fiancée qui était assise loin de là, jouant avec les femmes, tomber comme en défaillance. Il se détacha d'elle une figure sombre, qui m'inspirait une répugnance extraordinaire et qui parut, à partir de ses pieds, monter en elle ou devant elle, puis sortir de sa bouche ou se retirer à la hauteur de sa bouche. Il semblait aussi que des habits et des parures de toute espèce lui fussent retirés. Je ne sais pas comment j'arrivai là, mais je m'occupai avec une sollicitude extraordinaire à éloigner bien vite cette ombre sinistre qui m'inspirait tant d'horreur, et cette parure qui lui avait été enlevée : j'en étais toute préoccupée comme si j'eusse voulu cacher à tous les yeux quelque chose qui devait faire rougir la fiancée. Cette figure ne voulait pas s'en aller tout de suite, mais elle devint de plus en plus petite et je la poussai avec les parures dans un vieux coffre qui était près de là. Lorsque je l'y enfonçai, la tête seule et les épaules paraissaient encore ; la fiancée resta très pâle, mais comme pénétrée d'une clarté pure, et elle parut vêtue avec une grande simplicité. Lorsque je me mêlais à cette scène, je vis aussi une coopération de la sainte Vierge. Elle aussi travailla à chasser cette figure sombre.
Certaines pénitences à faire se rattachaient à chaque lot : ainsi je me souviens que le fiancé et la fiancée devaient prendre à la synagogue quelque chose que j'ai oublié, et faire certaines prières. La plante qui était échue à Nathanaël Khased était un bouquet de patience.
J'ai vu, dans plusieurs autres occasions, le fruit du fiancé : lorsque j'en parle, je vois aussi la fleur et j'en fais un mélange dans ma description. L'effet merveilleux de ce fruit se manifesta lorsque le fiancé en eut envoyé une part à la fiancée et que tous deux en eurent mangé. il arriva quelque chose de semblable à tous les autres disciples qui reçurent de ces lots et mangèrent des fruits qui leur étaient échus. Leurs passions dominantes opposèrent une certaine résistance et sortirent d'eux, ou tout au moins ils se sentirent plus forts dans leu r lutte contre elles. Il y a dans tous les fruits et les plantes un certain mystère surnaturel qui, depuis que l'homme est tombé et a entraîné la nature dans sa chute, est devenu un mystère naturel : il ne reste plus qu'un souvenir de tout ce qui s'y trouvait alors dans les propriétés ; la forme, le goût et l'action de ces créatures. Dans les songes et sur les tables du ciel, ces fruits se montrent avec les propriétés qu'ils avaient avant la chute, toutefois ce n'est pas toujours parfaitement clair : parce que maintenant tout est rendu confus par notre manière actuelle de comprendre et par l'usage ordinaire que nous faisons de ces choses.
Le fruit que les fiancés mangèrent se rapportait à la chasteté, et la figure qui se retira d'eux était la convoitise impure de la chair. Je ne sais pas si cette figure que je vis aurait été vue par quelque autre personne dans un état contemplatif du même genre : je ne sais pas s'il sortit réellement de la fiancée un esprit sensuel, ou si ce fut seulement un symbole destiné à me faire comprendre ce qui se passait en elle.
Remarque de l'écrivain. Comme la narratrice joua elle même un rôle actif dans cette vision historique, ce ne fut évidemment qu'une vision dans une vision : mais si, étant clairvoyante comme elle l'était, elle eût été alors présente en personne, elle aurait vraisemblablement vu la même chose et aurait cherché à la chasser et à la cacher comme elle le fit dans son rêve et comme elle le raconta étant éveillée, non sans quelque répugnance. Si elle eût été réellement présente alors, sa manière d'agir contre ce symbole de la sensualité qui se retirait, eût été aussi inexplicable et aussi surprenante pour les femmes qui étaient là que le sont aujourd'hui pour nous bien des choses qu'elle fait en rêvé. Mais dans la scène qui lui est présentée en songe, son intervention active ne trouble pas le cours de la vision et les assistants ne la voient point : de ce qu'elle voit la sainte Vierge s'efforcer aussi de cacher cette figure, on peut induire que vraisemblablement là mère de Dieu vit ce qui arrivait à la fiancée et le vit peut être sous la même forme ou probablement sous une forme d'un sens encore plus profond. Elle aussi, la plus pure parmi les plus pures, désire que les assistants ne puissent pas soupçonner la cause qui a fait tomber la fiancée en défaillance.
Lorsque la fiancée tomba en faiblesse, on ôta les pièces les plus lourdes de son vêtement et on retira plusieurs anneaux de ses doigts où elle en avait une quantité : on enleva aussi, pour l'alléger, des chaînes et des agrafes qu'elle avait aux bras et sur la poitrine. Elle ne conserva de ses bijoux que l'anneau nuptial que lui avait donné la sainte Vierge et au cou un joyau d'or, ayant à peu près la forme d'un arc bandé dans lequel était enchâssée une matière noirâtre de même nature que sur l'anneau nuptial de Marie et de Joseph : là dessus était représentée une figure couchée, tenant un bouton de fleur qu'elle regardait.
Aux jeux dans le jardin succéda le repas de noce. La salle dont il a été parlé plus haut était divisée en trois compartiments, par deux cloisons assez basses pour que les convives passent se voir : dans chacune de ces divisions était placée une table longue et étroite. Jésus était au haut bout de la table du milieu. à cette table étaient assis Israël, père de la fiancée, les cousins de celle ci, ceux de Jésus et en outre Lazare. Les autres conviés étaient aux tables latérales. Les femmes étaient assises dans la pièce située derrière le foyer, mais elles pouvaient entendre toutes les paroles du Seigneur. Le fiancé servait à table. Il y avait pourtant aussi un maître d'hôtel portant un tablier, et quelques domestiques. La fiancée servait les femmes, avec l'aide de quelques servantes. Lorsque les plats furent apportés, on plaça devant Jésus un agneau rôti ; il avait les pieds attachés en forme de croix. Le fiancé ayant alors apporté à Jésus une boîte où se trouvaient les couteaux à découper, Jésus lui dit en particulier qu'il devait se souvenir de ce repas d'enfants, donné après sa douzième fête de Pâques où lui, Jésus, avait raconté une parabole touchant un mariage et lui avait dit qu'il irait à ses noces, prédiction qui s'accomplissait aujourd'hui.
Le fiancé devint alors tout pensif ; car il avait entièrement oublié cet incident. Jésus fut pendant le repas, comme pendant toute la durée des noces, plein d'une douce sérénité et en même temps abondant en discours instructifs. Il expliqua le sens spirituel de chacun des incidents du repas. Il parla des divertissements et de l'allégresse qui préside aux fêtes. Il dit que l'arc ne devait pas rester toujours bandé, que le champ avait besoin d'être rafraîchi par la pluie, et il ajouta des paraboles relatives au même objet. Il découpa ensuite l'agneau et il tint à ce propos des discours admirables : il dit que l'agneau était mis à part du troupeau, qu'il était choisi, non pour vivre à son gré et perpétuer sa race, mais pour être livré à la mort ; après quoi on le purifiait par le feu qui consumait ce qu'il y avait en lui de grossier, et l'on coupait ses membres en morceaux : de même il fallait que ceux qui voulaient se mettre à la suite de l'Agneau se séparassent de ceux qui leur étaient unis le plus étroitement parles liens de la chair. Et lorsqu'il fit passer autour de la table les morceaux découpés et qu'on se mit à manger l'agneau, il dit que l'Agneau serait séparé des siens et mis en pièces afin de devenir pour eux tous une nourriture qui les unirait par un lien commun, que de même quiconque suivrait l'Agneau, aurait à renoncer à son pâturage, devrait mourir à ses passions, se séparer des membres sa famille et devenir une nourriture et un aliment d'union par l'Agneau et dans son Père céleste, etc.
Je ne puis pas répéter exactement tout cela. (On voit au moins là le sens général de cet enseignement.)Chacun avait devant lui une assiette ou un pain, je ne sais pas lequel des deux. Jésus fit aussi passer à la ronde une espèce de patène d'un brun foncé avec un rebord jaune. Je le vis plusieurs fois prendre en main un petit bouquet d'herbes et enseigner à cette occasion. Jésus s'était chargé de fournir le second service du repas de noce et sa mère et Marthe avaient pourvu à tout ; il avait dit aussi qu'il se chargeait du vin. Lorsque le second service, qui se composait d'oiseaux, de poisson, de préparations au miel, de fruits et d'une espèce de pâtisseries que Séraphia (Véronique) avait apportées, eut été placé sur la table latérale, Jésus y alla et fit les portions, puis il revint prendre sa place. Les plats furent servis, mais le vin manquait. Cependant Jésus enseignait. Cette partie du repas était particulièrement confiée aux soins de la sainte Vierge, et lorsqu'elle vit que le vin faisait défaut, elle alla à Jésus et lui rappela avec quelque inquiétude qu'il lui avait dit qu'il pourvoirait au vin ; alors Jésus, qui venait d'enseigner sur son Père céleste, lui dit : " Femme, ne vous tourmentez pas, ne vous inquiétez ni de vous, ni de moi, mon heure n'est pas encore venue. "Il n'y avait là rien de dur pour la sainte Vierge. Il lui dit : " Femme "et non pas a ma mère "parce qu'en ce moment il voulait agir en qualité de Messie, en qualité de Fils de Dieu, accomplir une opération mystérieuse en présence de ses disciples et de tous ses parents, parce qu'il était là dans sa force divine.
Le Pèlerin résume dans la note suivante le sentiment de la narratrice ; Jésus lui dit : " Femme " comme étant le rejeton qui devait écraser la tête du serpent. Il voulait aussi montrer dans cette occasion qu'il était plus qu'un fus de Marie, une femme qui leur était connue, et il l'appela " femme " parce qu'il allait agir en vertu de sa divinité, qu'il allait créer ou transformer, de même qu'il se donnait à lui même le nom de Fils de l'homme, lorsqu'il parlait de sa Passion future, sans s'abaisser en rien par là. Dans de pareils moments où Jésus agissait en qualité de Verbe incarné, chaque chose, par cela même qu'il la nomme ce qu'elle est, se trouve rehaussée et à quelques égards gratifiée d'une fonction ou d'une dignité par l'énonciation de son nom dans une circonstance aussi solennelle. Marie était la " femme " qui avait enfanté celui auquel elle s'adresse ici comme au Créateur, lui demandant du vin pour ses créatures devant lesquelles il va manifester sa dignité suprême. Il va leur montrer ici qu'il est le Fils de Dieu et non qu'il est le fils de Marie. Lorsqu'il mourut sur la croix au pied de laquelle elle pleurait, il lui dit aussi : " Femme, voilà votre fils, " lui désignant Jean par ces paroles. Jésus lui avait dit qu'il pourvoirait au vin ; elle s'avance alors comme la figure de celle qui intercède pour nous par excellence, et elle lui représente que le vin fait défaut ; mais le vin qu'il voulait donner était plus que du vin pris dans le sens ordinaire ; il avait rapport au mystère de ce vin qu'il voulait changer plus tard en son sang. Il lui dit : " Mon heure n'est pas encore venue, " c'est à dire, il n'est pas encore temps, premièrement que je donne le vin promis, en second lieu, que je change l'eau en vin, en troisième lieu, que je change le vin en mon sang. Marie alors n'eut plus de soucis pour les hôtes des fiancés ; elle avait prié son Fils et c'est pourquoi elle dit aux serviteurs : "Faites tout ce qu'il vous dira. "
C'est précisément comme si la fiancée de Jésus, l'Eglise, lui adressait cette prière : "Seigneur, vos enfants n'ont pas de vin ; "et que Jésus ne lui répondît pas : "Ma fiancée, "mais, " Eglise, ne t'inquiète pas, ne te trouble pas, mon heure n'est pas encore venue ; "et encore comme si l'Eglise disait aux prêtres : "Observez toutes ses indications et ses commandements, car il vous viendra en aide, etc. "
Marie dit donc aux serviteurs d'attendre et d'exécuter les ordres de Jésus : et au bout de quelque temps, Jésus ordonna aux serviteurs d'apporter devant lui les urnes vides : il y avait trois urnes d'eau et trois de vin, et ils montrèrent qu'elles étaient vides en les retournant sur un bassin. Jésus leur ordonna de les remplir toutes d'eau. Ils les portèrent à la fontaine qui se trouvait dans un caveau et consistait en un réservoir de pierre avec une pompe. Ces urnes étaient des vases de terre fort grands et fort lourds, et il fallait deux hommes pour en porter une par les deux anses. Il y avait depuis le haut jusque en bas plusieurs tuyaux fermés avec des bondes, et quand le liquide était épuisé jusqu'à une certaine hauteur, on retirait la bonde inférieure et on versait. On ne levait pas les urnes pour verser, on se bornait à les incliner un peu sur leurs bases élevées.
L'avertissement de Marie fut donné à voix basse, la réponse de Jésus à haute voix, aussi bien que l'ordre de puiser l'eau. Lorsque les urnes remplies d'eau furent placées toutes les six devant le buffet, Jésus y alla et les bénit, puis étant retourné à sa place, il dit : " Versez et portez à boire au maître d'hôtel. "Lorsque celui ci eut goûté le vin, il alla trouvé le fiancé et lui dit : " Ordinairement on donne le bon vin le premier, puis lorsque les convives sont rassasiés, on en donne de moins bon, mais vous avez réservé le meilleur vin pour la fin ". Il ne savait pas que Jésus s'était chargé de fournir ce vin comme toute cette partie du repas ; cela n'était connu que de la sainte Famille et de la famille des mariés. Alors le fiancé et le père de la fiancée en burent avec un grand étonnement, et les serviteurs assurèrent que c'était de l'eau qu'ils avaient puisée et dont ils avaient rempli les vases et les coupes qui étaient sur les tables. Tous alors en burent : mais il n'y eut point de tumulte au sujet de ce miracle ; tous les convives gardaient un silence respectueux, et Jésus prit occasion de ce prodige pour enseigner. Il dit entre autres choses que le monde donnait d'abord du vin capiteux, puis profitait de l'ivresse des convives pour leur donner un mauvais breuvage, mais qu'il n'en était pas ainsi dans le royaume que son Père céleste lui avait donné : que là, l'eau pure devenait un vin exquis, de même que la tiédeur devait se changer en ferveur et en zèle énergique. Il parla, en outre, du repas auquel il avait pris part, dans sa douzième année, après son retour du temple, avec plusieurs de ceux qui étaient là présents ; il rappela qu'alors il avait parlé de pain et de vin et raconté une parabole relative à des noces où l'eau de la tiédeur deviendrait le vin de l'enthousiasme, ce qui s'accomplissait maintenant. Il leur dit encore qu'ils verraient de plus grands prodiges, qu'il célébrerait la Pâque plusieurs fois et qu'à la dernière, le vin serait changé en sang et le pain en chair ; qu'il resterait avec eux, les consolerait et les fortifierait jusqu'à la fin : que du reste, après ce repas, ils lui verraient arriver des choses qu'ils ne pourraient pas comprendre actuellement s'il les leur disait. Il ne s'exprima pas aussi clairement que je le fais ; tout cela était enveloppé dans des paraboles que j'ai oubliées, toutefois c'en était là le sens. En l'écoutant ainsi parler, ils furent saisis de crainte et d'étonnement. Mais tous étaient comme transformés par ce vin, et je vis qu'indépendamment de l'effet du miracle qu'ils avaient vu, le vin lui même, comme précédemment les fruits, avait opéré intérieurement en eux, les avait fortifiés et profondément changés. Tous les disciples, tous ses parents, tous les convives étaient maintenant convaincus de sa puissance, de, sa dignité et de sa mission. Ils croyaient tous en lui, cette foi s'était répandue dans tous à la fois, et tous ceux qui avaient bu de ce vin étaient devenus meilleurs, plus unis et plus fervents. Il était ici pour la première fois au milieu de la communauté qu'il formait : ce fut le premier prodige qu'il fit au milieu d'elle et tour elle, afin de la fonder dans la foi en lui. Voilà aussi pourquoi il est dit dans son histoire que ce fut son premier miracle. de même que la Cène est racontée comme le dernier, fait alors que ses disciples croyaient.
A la fin du repas, le fiancé vint encore trouver Jésus en particulier ; il lui parla avec beaucoup d'humilité et lui déclara qu'il se sentait mort à toute convoitise de la chair et qu'il désirait vivre dans la continence avec son épouse, si celle ci le trouvait bon. La fiancée vint également trouver Jésus en particulier et lui dit la même chose. Alors Jésus les fit venir tous les deux ensemble et leur parla du mariage, de la pureté qui est si agréable à Dieu, et des fruits que la vie de l'esprit rend au centuple.
Il cita beaucoup de prophètes et de saints personnages qui avaient vécu dans la chasteté et immolé leur chair au Père céleste, dit comment ils avaient eu pour enfants spirituels bien des hommes égarés qu'ils avaient ramenés au bien et comment ils avaient donné naissance à une nombreuse et sainte postérité. Tout cela fut dit dans le sens de dissiper et de recueillir. Ils firent voeu de continence pour trois ans, s'engageant à vivre comme frère et soeur. Puis ils s'agenouillèrent devant Jésus et il les bénit.
(3 janvier.) La narratrice était très gravement malade et elle dit seulement ce qui suit : Jésus avait enseigné dans la salle du festin. On n'alla pas, se promener en plein air ; plusieurs disciples de Jean sont partis ainsi que Lazare et Marthe. Je les ai vus manger quelque chose debout, tous ont leurs habits retroussés. Pendant tout le cours de la fête, Lazare fut traité avec tous les égards dus à un homme de distinction par le père de la fiancée qui s'occupa personnellement beaucoup de le servir. Il a des manières très distinguées : il est sérieux et son attitude est à la fois réservée et bienveillante : il est très calme, parle peu et regarde Jésus avec beaucoup de ferveur.
Le soir de ce jour, qui était le quatrième jour des noces, on était allé en grand cortège installer la fiancée et le fiancé dans leur maison. On portait un candélabre avec des flambeaux allumés dont chacun figurait une lettre ; des enfants marchaient en avant du cortège, ils portaient sur des bandes d'étoffe une couronne de fleurs ouverte et une autre fermée : ils les défirent devant la maison des fiancés et semèrent les fleurs autour d'eux. Jésus était dans la maison et les bénit. Les prêtres étaient présents. Depuis le miracle de Jésus lors du repas, leur contenance est très humble et ils le laissent tout diriger.
La Soeur croit bien, toutefois sans rien affirmer, que cette installation était une pure cérémonie, que la fiancée resta encore chez ses parents jusqu'à la fin de la fête et des jeûnes qui allaient commencer.
(4 janvier) Les autres hôtes sont partis pour la plupart, notamment Marie et les saintes femmes. Nathanaël Khased, les fils de Cléophas, appelés les frères de Jésus et d'autres disciples étaient encore là. Le soir du 4ème jour du sabbat et commencement du 7è de Thébet, Jésus enseigna, dans la synagogue, sur la fête qui venait d'avoir lieu, sur l'obéissance et les pieuses dispositions de ce couple de fiancés, etc.
( 5 janvier.) Ce jour là, qui était celui du sabbat, Jésus enseigna deux fois dans la synagogue de Cana, et lorsqu'il sortit, plusieurs personnes se prosternèrent devant lui et lui demandèrent son assistance pour des malades. Il fit ici deux guérisons merveilleuses un homme était tombé du haut d'une tour, il était mort et tous ses membres étaient brisés. Jésus alla à lui, rajusta ses membres, toucha les fractures et lui ordonna de se lever et d'aller dans sa maison, ce qu'il fit après avoir remercié : il avait une femme et des enfants. Jésus fut aussi conduit à un possédé qui était enchaîné à une pierre et il le délivra. Il guérit en outre des hydropiques et une femme affligée d'une perte de sang qui était une pécheresse publique. Les malades qu'il guérit étaient au nombre de sept. Ces gens n'avaient pas osé venir pendant la fête ; mais lorsque le bruit se répandit qu'il partirait après le sabbat, il fut impossible de les retenir. Les prêtres, après le prodige des noces, le laissèrent faire tout ce qu'il voulut, et ces miracles eurent lieu en leur présence : les disciples n'étaient pas présents.
FIN DU PREMIER VOLUME