Histoire et construction du Mont Saint Michel. Normandie. France.
Le Mont-Saint-Michel
Administration
Pays France
Région Normandie
Département Manche
Arrondissement Avranches
Intercommunalité Communauté d'agglomération Mont-Saint-Michel-Normandie
Maire
Mandat Yann Galton
2014-2020
Code postal 50170
Code commune 50353
Démographie
Gentilé Montois
Population
municipale 30 hab. (2017 )
Densité 7,5 hab./km2
Géographie
Coordonnées 48° 38′ 10″ nord, 1° 30′ 41″ ouest
Altitude Min. 5 m
Max. 80 m
Superficie 4 km2
Élections
Départementales Canton de Pontorson
Législatives Deuxième circonscription
Localisation
Géolocalisation sur la carte : Normandie Le Mont-Saint-Michel
Géolocalisation sur la carte : Manche Le Mont-Saint-Michel
Géolocalisation sur la carte : France Le Mont-Saint-Michel
Géolocalisation sur la carte : France Le Mont-Saint-Michel
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Le Mont-Saint-Michel
[Note 1] est une commune française située dans le département de la Manche en Normandie. Elle tire son nom de l'îlot rocheux consacré à saint Michel où s'élève aujourd'hui l'abbaye du Mont-Saint-Michel.
L'architecture du Mont-Saint-Michel et sa baie en font le site touristique le plus fréquenté de Normandie[1] et l'un des dix plus fréquentés en France[Note 2] - premier site après ceux d'Île-de-France - avec près de deux millions et demi de visiteurs chaque année (3 250 000 en 2006[2], 2 300 000 en 2014[3]).
Une statue de saint Michel placée au sommet de l'église abbatiale culmine à 157,10 mètres au-dessus du rivage. Élément majeur, l'abbaye et ses dépendances sont classées au titre des monuments historiques par la liste de 1862[4] (60 autres constructions étant protégées par la suite[5]) ; l'îlot et le cordon littoral de la baie figurent depuis 1979[6] sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO ainsi que le moulin de Moidrey depuis 2007. Par ailleurs le mont bénéficie d'une seconde reconnaissance mondiale en tant qu'étape des Chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France pour « les pèlerins du Nord de l'Europe (qui) passaient par le Mont lorsqu'ils se rendaient en Galice »[7].
En 2017, la commune comptait 30 habitants[Note 3], appelés les Montois. L'îlot du mont Saint-Michel est devenu au fil du temps un élément emblématique du patrimoine français.
Sommaire
- 1 Géographie
- 1.1 Caractéristiques de la baie
- 1.2 Territoire communal et communes limitrophes
- 1.3 Histoire du rocher
- 2 Histoire
- 2.1 Le temps des pèlerinages
- 2.2 Le temps du tourisme
- 3 Politique et administration
- 3.1 Administration municipale
- 3.2 Liste des maires
- 3.3 Jumelage
- 4 Population et société
- 4.1 Démographie
- 4.2 Manifestations culturelles et festivités
- 4.2.1 Concerts et expositions à l'abbaye
- 4.2.2 Festival « 13 siècles entre ciel et mer »
- 5 Économie
- 6 Culture locale et patrimoine
- 6.1 Monuments et lieux touristiques
- 6.2 L'abbaye et le Centre des monuments nationaux
- 6.3 Les Fraternités monastiques de Jérusalem
- 6.4 Héraldique
- 6.5 Personnalités liées à la commune
- 6.6 Gastronomie locale
- 6.7 Manifestations sportives
- 6.8 Le Mont-Saint-Michel et les arts
- 6.8.1 Dans la peinture
- 6.8.2 Dans la littérature
- 6.8.3 Dans la bande dessinée
- 6.8.4 Dans l'art contemporain
Géographie
Le mont Saint-Michel, situé à 48° 38' 10" de latitude nord et à 1° 30' 40" de longitude ouest, dans le « pays » de l'Avranchin, est un îlot rocheux à l'est de l'embouchure du Couesnon, lequel se jette dans la Manche. Pointement granitique d'environ 960 mètres de circonférence, cet îlot s'élève au-dessus d'une plaine sablonneuse à 92 mètres d'altitude. La construction de l'abbaye modifie cette perception : la hauteur du rocher à l'abbatiale fait 78,60 mètres, celle du sol de l'abbatiale au sommet de la tour fait 34,70 m, la flèche atteint une hauteur de 39,80 m. La statue de saint Michel de 4 m de hauteur culmine ainsi à 157,10 mètres[8].
Au niveau géologique, ce pointement est une intrusion leucogranitique (leucogranite à biotite et muscovite) de petite dimension mise en place dans le socle cadomien (encaissant schisteux briovérien) au cours de l'orogenèse calédonienne (525 Ma)[9]. Cette intrusion dégagée de sa gangue schisteuse et mise en relief par l'érosion (le leucogranite présentant une plus grande résistance à l'érosion que le schiste)[10], offre une superficie émergée d'environ 7 ha, au-dessus de laquelle se dresse l'abbaye. La partie essentielle du rocher est couverte par l'emprise au sol de l'abbaye du Mont-Saint-Michel et de son domaine. Le rocher ne représente qu'une petite partie de la commune qui s'étend aussi sur la digue et plusieurs dizaines d'hectares de polders.
En 1846, Édouard Le Héricher le décrivait ainsi : « Le Mont Saint-Michel apparaît comme une montagne circulaire qui semble s'affaisser sous la pyramide monumentale qui la couronne. On voudrait prolonger sa cime en une flèche aiguë qui monterait vers le ciel (la flèche actuelle ne date que de 1899), dominant son dais de brouillards ou se perdant dans une pure et chaude lumière. De vastes solitudes l'environnent, celle de la grève ou celle de la mer, encadrées dans de lointaines rives verdoyantes ou noires »[11].
Le mont Saint-Michel vu par le satellite Spot en 2003.
Caractéristiques de la baie
Article détaillé : Baie du Mont-Saint-Michel.
Le mont Saint-Michel (l'îlot ou l'abbaye) a donné à son tour son nom à la baie du Mont-Saint-Michel, dont le cordon littoral est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco.
La baie du Mont-Saint-Michel est le théâtre des plus grandes marées d'Europe continentale, jusqu'à 15 mètres de marnage, différence entre basse et haute mers. La mer rejoint ensuite les côtes « à la vitesse d'un cheval au galop », comme le dit l'adage.
Territoire communal et communes limitrophes
Communes limitrophes du Mont-Saint-Michel
Pontorson
Beauvoir Beauvoir
La commune s'étend sur environ 4 kilomètres carrés[12]. Hormis le rocher d'une superficie de 7 ha, le territoire communal comprend deux parties terrestres disjointes[13],[14] totalisant 393 ha, limitrophes des communes de Beauvoir (pour l'essentiel) et de Pontorson.
La partie la plus importante (environ 387 ha), à l'ouest du Couesnon, est constituée des hameaux de Belmontet, Saincey et Camus, et des polders Molinié et Tesnières. Cette partie est limitrophe de la commune de Beauvoir au sud[15].
La plus petite partie (environ 6 ha), à l'est du Couesnon, forme la partie occidentale du lieu-dit la Caserne, entre la route du Mont-Saint-Michel et le fleuve côtier. Elle est enclavée entre les territoires des communes de Beauvoir (au sud et à l'ouest) et Pontorson (à l'est)[16]. On y trouve quatre hôtels[17].
Histoire du rocher
Article détaillé : Mont Saint-Michel. Vue aérienne du mont Saint-Michel en 2005.
À l'origine, il était connu sous l'appellation de mont Tombe. Il devait s'y trouver une pierre ou un monument mégalithique destiné à un culte païen, auquel succédèrent deux oratoires, l'un dédié à saint Symphorien, l'autre à saint Étienne, édifiés par des ermites aux VIe et VIIe siècles, ainsi que le rapporte la Revelatio ecclesiae sancti Michaelis archangeli in Monte Tumba[18]. A la suite de cette première christianisation du mont Tombe, fut érigé un oratoire en l'honneur de l'archange saint Michel en 708 (709 pour la dédicace), comme l'indiquent les Annales du Mont-Saint-Michel rédigées au début du XIIe siècle. Aubert, évêque d'Avranches, installa sur le site une communauté de douze chanoines pour servir le sanctuaire et accueillir les pèlerins. C'est à cette époque que le mont accueillit, à l'est du rocher, les premiers villageois qui fuyaient les raids vikings[19]. Ce premier habitat a dû abriter les différents corps de métier nécessaires à l'édification du premier sanctuaire : tailleurs de pierre, maçons, tâcherons et charpentiers. Puis il a dû accueillir les laïcs chargés d'approvisionner la communauté religieuse. « Malgré les nombreuses reconstructions qui ont, petit à petit, façonné le bourg que nous connaissons aujourd'hui, le noyau primitif du village demeure encore perceptible : il correspond en effet à une zone caractérisée par une organisation parcellaire relativement complexe et un enchevêtrement de constructions desservies par des ruelles tortueuses »[20]. Il s'agit, grosso modo, du secteur où se trouvent implantés l'église paroissiale Saint-Pierre et son cimetière. La plupart des habitations devaient être construites en bois et en torchis.
À partir de l'an 710 et pendant tout le Moyen Âge, le mont fut couramment surnommé par les clercs « mont Saint-Michel au péril de la mer » (Mons Sancti Michaeli in periculo mari).
Le Mont était rattaché depuis la formation des circonscriptions ecclésiastiques au diocèse d'Avranches, en Neustrie, ce qui reflétait vraisemblablement une situation antérieure, c'est-à-dire l'appartenance du Mont au territoire des Abrincates, membres de la confédération armoricaine, sur lequel va se plaquer le cadre administratif romain, puis le cadre religieux chrétien, conformément à un processus observé ailleurs dans la future Normandie et au-delà.
En 867, le traité de Compiègne attribua le Cotentin, ainsi que l'Avranchin (bien que ça ne soit pas clairement stipulé), au roi de Bretagne, Salomon. L'Avranchin, tout comme le Cotentin, ne faisaient donc pas partie du territoire normand concédé au chef viking Rollon en 911. Le mont Saint-Michel restait breton, bien que toujours attaché au diocèse d'Avranches, lui-même dans l'antique province ecclésiastique de Rouen, dont la ville principale était aussi devenue capitale de la nouvelle Normandie. Il l'était encore en 933 lorsque Guillaume Ier de Normandie, dit Guillaume Longue Épée, « obtint du roi de France un agrandissement notable de son territoire, avec le Cotentin et l'Avranchin, jusqu'alors contrôlés par les Bretons. C'est donc à cette date que le Mont est officiellement rattaché à la Normandie »[21], la frontière politique de l'Avranchin se fixant transitoirement à la Sélune[22], fleuve côtier qui se jetait à l'est du Mont. Guillaume Longue Épée fit d'importants dons de terres à la communauté des chanoines montais, ces domaines étant presque tous situés entre le Couesnon et la Sélune[18].
Richard Ier de Normandie, fils de Guillaume Longue Épée, eut à cœur de poursuivre l'œuvre de réforme monastique de son père et il ordonna aux chanoines à qui le Mont avait été confié de renoncer à leur vie dissolue ou de quitter les lieux. Tous partirent sauf un, Durand, qui se réforma par amour pour l'archange. C'est ainsi que s'y établirent en 966 des bénédictins issus de différentes abbayes telles, sans doute, Saint-Taurin d'Évreux et Saint-Wandrille. L'histoire de cette fondation est relatée dans l'Introductio monachorum, qui figure au début du Cartulaire du Mont-Saint-Michel. Le premier abbé fut Mainard Ier. Une tradition bien établie veut qu'il s'agisse du réformateur Mainard, chargé de restaurer l'abbaye de Saint-Wandrille mais cette hypothèse reste controversée. C'est lui qui aurait fait édifier l'église préromane appelée Notre-Dame-sous-Terre, construite à cette même période[21]. Son neveu, Mainard II, lui succéda jusqu'en 1009, qui était aussi abbé de Redon. « À cette époque, le Mont scelle la bonne entente entre les deux ducs, de Normandie et de Bretagne »[21].
Sont inhumés dans la chapelle Saint-Martin de l'abbaye les ducs de Bretagne, de la maison de Rennes :
- Conan I le Tort (mort en 992), qui, lors de la confirmation d'une donation faite à l'abbaye du Mont-Saint-Michel, le 28 juillet 990 en présence de l'ensemble des évêques de Bretagne, prend le titre de Princeps Britannorum ;
- Geoffroy I Béranger (mort en 1008), époux d'Havoise de Normandie, grand bienfaiteur de l'abbaye en donnant les revenus de Saint-Méloir-des-Ondes et Saint-Benoît-des-Ondes.
Pendant le premier quart du XIe siècle, les bonnes relations perdurent entre les moines du Mont et les ducs, sous les abbés Hildebert Ier (1009-1017) puis Hildebert II (1017-1023). Mais elles se gâtent lorsque le duc normand Richard II , qui protégeait l'abbaye à l'instar de son père, décide de remplacer l'abbé montois par un abbé extérieur et réformateur, d'abord le Romain Supo puis le Bourguignon Thierry, déjà abbé de l'abbaye de Jumièges et gardien de l'abbaye de Bernay, alors dépendance de l'abbaye de Fécamp[21].
Le nouveau duc Robert Ier de Normandie, dit Robert le Magnifique, nomma en 1027 un abbé d'origine mancelle, Aumode, à qui il confia en 1032 sa nouvelle fondation, l'abbaye de Cerisy. L'abbé Supo fut donc rappelé et dirigea l'abbaye montoise jusqu'à sa retraite à l'abbaye de Fruttuaria avant 1048.
Le duc Guillaume le Conquérant s'intéressa de près aux successions abbatiales et octroya des bénéfices, tant temporels que spirituels, à l'abbaye du Mont qui avait soutenu financièrement la conquête de l'Angleterre. Ainsi, certains moines montois furent appelés à diriger des abbayes anglaises. Grâce aux revenus des terres et prieurés octroyés par le duc, l'abbatiale romane fut rapidement achevée. A la mort du Conquérant, le Mont traversa une période trouble mais grâce à l'excellente administration de ses abbés, notamment Bernard du Bec, l'abbaye connut un grand développement intellectuel. Elle échappa, en août 1138, au grand incendie que déclenchèrent les habitants d'Avranches et qui ravagea le village montois, à la suite d'un désaccord avec les moines sur la succession d'Henri Ier Beauclerc[23].
En 1009, le duc de Normandie décide d'exercer un contrôle direct sur l'abbaye du Mont-Saint-Michel et l'abbé Maynard Ier, issu de la communauté de Saint-Wandrille, est évincé et doit se replier à l'abbaye Saint-Sauveur de Redon.[réf. nécessaire] pour être remplacé par l'abbé Hildebert Ier, préféré par Richard II.
Profitant de la Régence d'Havoise de Normandie, sa sœur, sur la Bretagne et de l'agression du chef viking Olaf sur Dol-de-Bretagne en 1014, le duc Richard II de Normandie repousse vers 1027-1030 la frontière avec la Bretagne de la Sélune au Couesnon[réf. nécessaire].
En 1030, Alain III de Bretagne, duc de Bretagne, entre en conflit avec son cousin, le duc Robert Ier de Normandie fils de Richard II. C'est la toute puissance de Robert "le Magnifique" qui a dans son duché de Normandie, solidement rétabli le pouvoir ducal[24]. C'est dans cette optique d'hégémonie qu'il demande à son cousin Alain III de lui prêter un serment de fidélité[24]. Celui-ci refuse et résolut le duc de Normandie d'utiliser la force. Après la construction d'une forteresse, celle de Cheruel, le duc de Normandie lance une expédition en Bretagne[24]. Alain riposte en lançant une contre-offensive dans l'Avranchin, mais il est repoussé avec de lourdes pertes. Leur oncle Robert le Danois, archevêque de Rouen, sert de médiateur lors d'une entrevue au Mont-Saint-Michel[24]. En 1031, Alain et son frère Eon de Penthièvre font une donation au Mont-Saint-Michel.
L'histoire et la légende se brouillent à cette date. Les textes de l'époque ne précisent pas le sort du mont Saint-Michel, mais son rattachement à la Normandie est attesté quelques décennies plus tard, et il est déjà effectif depuis longtemps lorsque les Bretons de Guy de Thouars incendient le Mont en avril 1204 et massacrent la population normande.
Or, une légende affirme que le Couesnon, lors d'une de ses fréquentes divagations, se serait mis à déboucher à l'ouest du Mont, faisant ainsi passer ce dernier en Normandie[réf. nécessaire]. Si cette légende est exacte, le Mont aurait été situé à l'ouest du Couesnon en 1009 et la divagation du Couesnon se situerait quelques décennies plus tard. Si elle est fausse, le Couesnon se jetait déjà à l'ouest du mont Saint-Michel en 1009.
Quoi qu'il en soit, le Mont-Saint-Michel aura été breton de 867 à 933, de manière géopolitique, sans jamais avoir été intégré à l'archidiocèse de Dol, de même, la fondation d'un collège de chanoine par l'évêque d'Avranches dès le VIIe siècle, le choix de saint Michel comme saint protecteur de l'empire par Charlemagne, puis les donations de Rollon pour restaurer la collégiale et enfin sa conversion en abbaye bénédictine en 966 par une communauté de moines issue des abbayes de Saint-Wandrille, de Jumièges et de Saint-Taurin d'Évreux, toutes situées en Normandie, indiquent clairement l'appartenance permanente du Mont à la sphère d'influence de l'église franque puis normande, distinctes de l'église bretonne, ce qui rend la question de la localisation géographique exacte plutôt secondaire. La limite officielle entre la Bretagne et la Normandie est désormais fixée indépendamment de la localisation d'un cours d'eau - et précisément à 4 km à l'ouest, au pied du massif de Saint-Broladre.
Il faut noter que l'hypothèse d'une divagation importante du Couesnon est parfaitement cohérente et vraisemblable, tant les lits des cours d'eau pouvaient varier, en l'absence de toute canalisation - et parfois de plusieurs dizaines de kilomètres. Le fait que l'embouchure du Couesnon se trouvait à 6 km du rocher au XVIIIe siècle n'apporte aucune information sur sa position au fil des siècles précédents - la topographie rend même inévitable qu'il ait bougé régulièrement. En revanche, aucun texte n'atteste qu'il ait basculé d'un côté du mont Saint-Michel à l'autre.
Histoire
Le Mont-Saint-Michel-au-péril-de-la-Mer au début de l'ère chrétienne.
Le récit en partie légendaire et miraculeux de la fondation chrétienne de l'abbaye est issu d'un texte en latin de la Revelatio ecclesiae sancti Michaelis in monte Tumba[8] rédigé par un chanoine du Mont-Saint-Michel ou de la cathédrale d'Avranches au IXe siècle. Ce texte de circonstance s'inscrit dans le contexte de lutte de pouvoir entre la Bretagne et le Duché de Normandie avec le royaume franc ainsi que des réformes canoniques entreprises par les empereurs carolingiens[9],[10]. De plus, les chroniqueurs montois du IXe au XIIe siècle écrivent pour la gloire de Dieu, du prince et de la communauté où ils vivent, en vue de constituer des « légendes » mais il ne faut voir dans toutes les informations contenues dans leurs récits que de pures inventions et des fables mensongères, d'où la nécessité d'effectuer une lecture critique de ces textes[11].
À l'avènement du christianisme dans la région, aux alentours du IVe siècle, le Mont Tombe fait partie du diocèse d'Avranches, dont les limites correspondent à l'ancien territoire des Abrincates. Au milieu du VIe siècle, le christianisme s'implante véritablement dans la baie. À cette époque, le Mont Tombe offre un abri à de pieux solitaires, ermites (probablement des moines celtes insulaires, comme ailleurs en France) approvisionnés par le curé d'Astériac (commune de Beauvoir), qui veillent sur le site et mènent une vie contemplative autour d'oratoires. Les ermites saint Pair et saint Scubilion[12] en fondent un dédié au premier martyr chrétien, saint Étienne, élevé à mi-hauteur du rocher et un second en l'honneur du premier martyr d'Autun, saint Symphorien, élevé au pied du rocher[13].
Le songe de saint Aubert.
Dès le IVe siècle, le culte de saint Michel est largement répandu en Orient. Le saint fait son apparition en Occident à la fin du Ve siècle avec l'élévation d'un premier sanctuaire à Monte Sant'Angelo dans le massif du Gargano dans les Pouilles en Italie en 492. En 813, Charlemagne étend à l'ensemble de ses états la fête de la Saint-Michel. Dès lors, de nombreuses chapelles et édifices (tours, fondations) lui sont dédiés. Ils sont généralement édifiés dans des lieux isolés et élevés[14], pour rappeler que saint Michel est le « chef » des anges[15]. C'est dans ce contexte qu'est rapportée dans la Revelatio, l'édification, par l'évêque saint Aubert d'Avranches, d'un oratoire dédié à l'archange saint Michel en 708. Selon la légende, Aubert aurait reçu, au cours de son sommeil, trois fois l'ordre de Saint-Michel de faire ériger sur le Mont-Tombe un oratoire. Le sanctuaire doit être, selon les prescriptions de l'ange, une réplique du sanctuaire de Saint Michel au Mont-Gargan en Italie (Ve siècle). Aubert fait arracher une pierre cultuelle païenne présente sur le Mont Tombe et construit à la place un sanctuaire circulaire formé de morceaux de roc grossièrement empilés. En 708 environ, Aubert envoie deux chanoines chercher au sanctuaire italien du Mont-Gargan des reliques du lieu : une pierre où il aurait laissé l'empreinte de son pied et un morceau de son voile (ou selon une autre tradition) sur l'autel qu'il avait consacré. C'est au cours de cette mission que le raz de marée de mars 709 aurait englouti la forêt de Scissy et entouré le mont pour en faire une île. Puis selon la tradition montoise remontant au XIe siècle, l'évêque fait la dédicace de l'église le 16 octobre 709[16] et y installe un chapitre de douze chanoines. Le Mont-Saint-Michel était né. Les origines du Mont restent cependant obscures : si la légende populaire a conservé un récit pittoresque de la fondation originelle, cette fondation pourrait être antérieure à 708 et appartenir au développement monastique connu en Normandie entre le VIe au VIIIe siècle[9].
En 1960, Yves-Marie Froidevaux retrouve à l'est de la chapelle Notre-Dame-Sous-Terre[Note 2] un mur cyclopéen qui pourrait constituer les vestiges de l'oratoire construit en 708 par saint Aubert. Ce sanctuaire serait une chapelle reliquaire ayant abrité le tombeau du fondateur, Aubert et les reliques insignes ramenées du Mont-Gargan ou inventées (pierre avec l'empreinte, cape, bouclier, épée, disparues à la Révolution[17]). La chapelle aurait donc remplacé l'oratoire primitif.
Les premières constructions se révèlent insuffisantes et à l'époque carolingienne, d'importants bâtiments sont élevés, autour desquels se répartissent les cellules individuelles des religieux. Pour la première fois en 710, l'île montoise perd son appellation de « Mont-Tombe » pour prendre celui de « Mont-Saint-Michel-au-péril-de-la-Mer », appellation en référence au passage des pèlerins traversant la baie à l'origine d'enlisements ou de noyades. Pendant tout le Moyen Âge, il est couramment surnommé par les clercs Mons Sancti Michaeli in periculo maris avant que ne se fixe progressivement le nom de « Mont-Saint-Michel »[18].
Le mont Saint-Michel sur une carte au XVIIIe siècle.
L'histoire ancienne de la commune étant peu dissociable de l'histoire de l'abbaye elle-même, nous renvoyons à l'article consacré à l'abbaye du Mont-Saint-Michel, y compris pour les périodes gauloise et romaine.
Article détaillé : abbaye du Mont-Saint-Michel.
Le temps des pèlerinages
Le pèlerinage du mont Saint-Michel est attesté au IXe siècle et il est vraisemblable que les miquelots trouvent à cette époque le gîte et le couvert dans l'une des auberges du village, apparues pour les accueillir au pied du mont. Le village s'est ainsi développé à l'ombre de son abbaye médiévale, grandissant au tournant de l'an mille grâce à la protection des abbés bénédictins[25].
En 1204, durant la conquête de la Normandie par Philippe Auguste contre Jean sans Terre, les chevaliers bretons de Guy de Thouars, attaquent le mont Saint-Michel en représailles de l'assassinat d'Arthur par Jean sans Terre. Durant les combats, ils y mettent le feu, ce qui ravage entièrement le site. Les chevaliers de Guy de Thouars passent ensuite par l'épée tous ceux qui tentent de s'échapper[26].
L'économie du Mont est tributaire, depuis douze siècles, des nombreux pèlerinages, notamment jusqu'à la Révolution française. On vient de toute l'Europe du Nord en pèlerinage à l'abbaye : depuis l'Angleterre, la France, notamment du nord et de l'ouest.
Le mont Saint-Michel sur une carte de 1758.
C'est sous l'épiscopat de Mgr Abel-Anastase Germain qu'ont lieu le 3 juillet 1877, les fêtes grandioses du couronnement de saint Michel en présence d'un cardinal, de huit évêques, d'un millier de prêtres et d'une foule innombrable. Ce jour-là, alors que le canon tonne et que joue une musique militaire, l'évêque manque perdre la vie : en effet, juché au sommet d'une échelle pour couronner la tête de l'Archange, Mgr Germain est sur le point de perdre l'équilibre et de tomber dans le vide[27].
Le temps du tourisme
Un chemin de fer fut aménagé dès le début du XXe siècle pour desservir le mont.
Déjà depuis le XIXe siècle, les auteurs et peintres romantiques venaient au mont, pour son charme unique et ses qualités pittoresques, tel Guy de Maupassant. À la fin du siècle, plusieurs hôtels sont établis au Mont. Dans la deuxième moitié du XXe siècle, la mutation du site en un lieu de visite de rang mondial a fait de la petite commune normande l'une des premières destinations touristiques de France.
La fréquentation du site et de l'abbaye est concentrée dans le temps. Elle est la plus forte au cours de la période estivale et de certains week-ends printaniers qui concentrent le tiers des visiteurs du Mont-Saint-Michel, avec une moyenne journalière approchant les 12 000 visiteurs et des pics dépassant les 16 000 visiteurs par jour, avec un flux de visiteurs de moins en moins dense au fur et à mesure de l'ascension vers l'abbaye (un tiers seulement montant jusqu'à l'abbaye). Le temps moyen de visite est de deux à trois heures. « Au cours d'une journée, c'est entre 11h et 16h que la densité de visiteurs sur le site est la plus forte »[28].
Le Mont connaît un déclin de fréquentation depuis le début du XXIe siècle, passant de 3,5 millions de visiteurs à 2,2 millions en 2013. Le site pâtit en effet des nouvelles conditions de desserte de la presqu'île et de la mauvaise réputation du Mont-Saint-Michel qui fait payer cher des prestations médiocres[29].
Depuis le 22 juillet 2014, les visiteurs peuvent se rendre au Mont par les nouveaux ouvrages d'accès créés par l'architecte Dietmar Feichtinger qui a remporté le concours du projet Saint-Michel. Une nouvelle digue et une passerelle sur pilotis laissant passer l'eau en dessous desservent désormais l'île. Cependant, le déclin touristique se poursuit, en raison notamment de la hausse des tarifs de stationnement, de la traversée à pied qui prend 50 minutes ou des navettes qui n'effectuent qu'une partie du parcours[30].
- Le Mont en 1900.
- Le Mont en 2004.
Le Mont Solaire, installation Land Art, équinoxe d'automne 1988
- Le Mont en hiver 2011.
- Le Mont en 2014 avec la nouvelle jetée.
Marées du siècle en mars 2015
La mer se retire sous le soleil de midi au mont Saint-Michel.
Sauveteur-en-Mer au mont Saint-Michel.
Le Mont-Saint-Michel vu de la passerelle.
Politique et administration
Administration municipale
Le conseil municipal est composé de sept membres dont le maire et deux adjoints[31].
Liste des maires
Liste des maires
Période Identité Étiquette Qualité
Les données manquantes sont à compléter.
1971 1983 Julien Nicolle Hôtelier
1983[32] mars 2001 Éric Vannier DVD PDG du groupe Mère Poulard
mars 2001[33] mars 2008 Patrick Gaulois UMP Hôtelier-restaurateur
mars 2008[32] mars 2014 Éric Vannier DVD PDG du groupe Mère Poulard
mars 2014[34] En cours Yann Galton DVD Restaurateur retraité
Jumelage
- Depuis 2008, avec le bourg de Miyajima sur l'île d'Itsuku[35].
Population et société
Démographie
L'évolution du nombre d'habitants est connue à travers les recensements de la population effectués dans la commune depuis 1793. À partir de 2006, les populations légales des communes sont publiées annuellement par l'Insee. Le recensement repose désormais sur une collecte d'information annuelle, concernant successivement tous les territoires communaux au cours d'une période de cinq ans. Pour les communes de moins de 10 000 habitants, une enquête de recensement portant sur toute la population est réalisée tous les cinq ans, les populations légales des années intermédiaires étant quant à elles estimées par interpolation ou extrapolation[36]. Pour la commune, le premier recensement exhaustif entrant dans le cadre du nouveau dispositif a été réalisé en 2006[37].
En 2017, la commune comptait 30 habitants[Note 4], en diminution de 26,83 % par rapport à 2012 (Manche : -0,49 %, France hors Mayotte : +2,36 %).
Au Moyen Âge, 300 à 400 personnes vivaient au Mont. La population est tombée à 234 en 1800 avant que l'abbaye devienne une centrale pénitentiaire en 1810. La prison ferme en 1863 et la population, revenue aux valeurs antérieures, décline depuis, l'inconfort des maisons du Rocher (exiguës, humides car construites à même la roche qui suinte en permanence, et non accessibles en voiture) incitant les habitants à s'installer dans des maisons plus agréables dans la baie. Parmi les 44 Montois dénombrés en 2013, 20 habitent dans les polders, 24 intra-muros (une famille avec deux enfants, une commerçante, l'administrateur du monument, deux pompiers, un agent de sécurité, cinq moines, sept moniales et trois prêtres)[38].
Évolution de la population [ modifier ]
1793 1800 1806 1821 1831 1836 1841 1846 1851
234 234 282 904 390 385 1 082 1 100 1 182
Évolution de la population [ modifier ], suite (1)
1856 1861 1866 1872 1876 1881 1886 1891 1896
1 153 1 056 203 193 184 209 211 199 230
Évolution de la population [ modifier ], suite (2)
1901 1906 1911 1921 1926 1931 1936 1946 1954
235 238 232 230 247 250 231 186 268
Évolution de la population [ modifier ], suite (3)
1962 1968 1975 1982 1990 1999 2006 2011 2016
132 105 114 80 72 46 41 43 30
Évolution de la population [ modifier ], suite (4)
2017 - - - - - - - -
30 - - - - - - - -
De 1962 à 1999 : population sans doubles comptes ; pour les dates suivantes : population municipale.
(Sources : Ldh/EHESS/Cassini jusqu'en 1999[39] puis Insee à partir de 2006[40].)Histogramme de l'évolution démographique
Évolution des naissances
1956-1962 1962-1968 1968-1975 1975-1982 1982-1990 1990-1999
xx 13 16 8 6 4
Évolution des décès
1956-1962 1962-1968 1968-1975 1975-1982 1982-1990 1990-1999
xx 6 6 4 5 3
La commune accueille jusqu'à 20 000 visiteurs par jour pendant la saison estivale.
Manifestations culturelles et festivités
Concerts et expositions à l'abbaye
Soucieux de redonner un rayonnement culturel au Mont, le Centre des monuments nationaux organise depuis 2010 une série de concerts de prestige à l'abbaye entre mai et septembre. Ainsi ont été invités Jordi Saval / Hespèrion XXI, le chœur accentus / Laurence Equilbey, le Concert spirituel / Hervé Niquet, Anne Queffélec, Jean-Guihen Queyras, l'Orchestre de Basse-Normandie, l'Orchestre de la Garde républicaine, les organistes Vincent Warnier, Didier Hennuyer et Thierry Escaich...
À cette occasion, la restauration de l'orgue est achevée en 2012.
Des expositions sont proposées chaque année par le CMN, dont une exposition Arnulf Rainer en 2012.
Festival « 13 siècles entre ciel et mer »
Lors de l'élaboration des festivités du 13e centenaire de la fondation du mont, le diocèse de Coutances et Avranches et l'association Robert-de-Torigni décidèrent, entre autres, de créer un festival d'Art chrétien pour « sensibiliser le visiteur au côté spirituel du Mont-Saint-Michel ». Celui-ci aurait lieu en juillet 2008 et concorderait avec les Journées mondiales de la jeunesse 2008 organisées à Sydney.
C'est ainsi, que durant ce mois de juillet, avec l'aide des Fraternités monastiques de Jérusalem du Mont-Saint-Michel, deux semaines de festival ont été proposées, composées d'une semaine de concerts et d'animations variées (classique, gospel...) et une autre d'exposition (calligraphie, reliure, dessin). De plus, des célébrations, veillées et autres festivités ont eu lieu, en relation avec les JMJ de Sydney.
Après cette édition fondatrice, le festival a été pérennisé, se déroulant durant une semaine chaque été.
Économie
Le Mont-Saint-Michel a longtemps « appartenu » à quelques familles, qui se partageaient les commerces de la commune, et se succédaient à l'administration du village. Le tourisme est en effet la principale, et même quasi unique source de revenus de la commune malgré l'agriculture sur les polders. On compte une cinquantaine de commerces pour 3 millions de touristes, alors que seulement 25 personnes dorment chaque soir sur le mont (moines inclus) hormis dans les hôtels.
Aujourd'hui, se partagent les principaux établissements de la commune :
- Éric Vannier, propriétaire du groupe de la Mère Poulard (détenant la moitié des restaurants, commerces et hôtels de la commune intra- et extra-muros, ainsi que trois musées) ;
- Jean-Yves Vételé, président-directeur général de la Sodetour (cinq hôtels, un supermarché et des commerces tous extra-muros, dont le Mercure La Caserne) ;
- Patrick Gaulois, ancien édile, hôtelier et restaurateur intra-muros (et à Saint-Malo) ;
- des commerçants indépendants.
[pertinence contestée]
Le Mont-Saint-Michel est dénommé « commune touristique » depuis août 2009[41].
Culture locale et patrimoine
L'entrée du Mont et la cour de l'Avancée avec ses panneaux informatifs placardés sur la muraille. Bombardes anglaises posées sur affût, avec leurs boulets en pierre de 160 livres. Porte du lion. Cour du boulevard avec à gauche le restaurant de la Mère Poulard et au fond la porte du roi. Chemin de ronde. Châtelet d'entrée de l'abbaye.
Monuments et lieux touristiques
Article détaillé : Liste des monuments historiques du Mont-Saint-Michel.
L'entrée du village qui débouche sur la cour de l'Avancée est constituée d'une porte charretière et d'une porte piétonne[Note 5]. Les pèlerins qui l'empruntaient étaient contrôlés par les gardes puis pouvaient se désaltérer, à l'angle de l'escalier de la cour, dans la fontaine d'eau potable dont la vasque affecte la forme d'une coquille Saint-Jacques. La cour de l'Avancée qui forme un espace triangulaire, est aménagée en 1525 par le lieutenant Gabriel du Puy. Défendue par un chemin de ronde surélevé et par une tour en demi-lune flanquant les ouvertures de la cour suivante, cette cour protégeait les abords de la cour du Boulevard[42]. L'escalier mène à l'ancien corps de garde aux bourgeois, construction en granite couverte en essentes, qui abrite désormais l'office du tourisme du Mont-Saint-Michel. Cette cour expose deux michelettes, bombardes longues respectivement de 3,64 m et 3,53 m, de 0,48 et 0,38 de diamètre intérieur, et pesant 2,5 tonnes[43]. Ces deux pièces d'artillerie sont fabriquées au moyen de douves en fer plat cerclées au feu par des colliers également en fer, solidement frettées[Note 6]. La tradition montoise rapporte que ces canons ont été abandonnés par les troupes de Thomas de Scales le 17 juin 1434 lors de la guerre de Cent Ans et ont été rapatriés intra-muros comme trophée par les habitants du Mont qui en ont fait le symbole de leur indépendance[45].
Au fond de la cour, la porte du lion (référence à cet animal gravé sur un écusson aux armes de l'abbé Robert Jollivet) ouvre sur la cour du Boulevard construite en 1445 par Louis d'Estouteville, capitaine du Mont-Saint-Michel et gouverneur de Normandie. Cette cour exiguë est occupée par des constructions modernes du XIXe siècle, dont le restaurant de la Mère Poulard et l'hôtel les Terrasses Poulard, propriétés du groupe Mère Poulard, groupe industriel et hôtelier qui possède près de la moitié des hôtels et restaurants du mont[46]. Unique entrée du village à l'origine, la porte du roi est construite vers 1435 par Louis d'Estouteville. Elle est protégée dix ans plus tard par une barbacane appelée désormais cour du Boulevard. Dotée d'une herse, elle est précédée par un pont-levis reconstitué en 1992 par l'architecte Pierre-André Lablaude et par un fossé empli d'eau les jours de grande marée[47]. Au-dessus de cette porte se trouve le logis du Roi, appartement à deux étages qui servait de logement à l'officier représentant le pouvoir royal et chargé par le souverain de garder l'entrée du village. Ce logement abrite aujourd'hui la mairie montoise. Le cadre rectangulaire situé au-dessus de la porte charretière était autrefois décoré par un relief aujourd'hui estompé. Il représentait les armoiries du roi, de l'abbaye et de la ville : deux anges supportant le blason royal à trois fleurs de lys surmonté de la couronne royale, au-dessous deux lignes de coquilles posées deux à deux (rappel du Mont, vassal du roi de France) et pour support deux poissons posés en doubles fasces ondées (évocation des vaguelettes lors des marées)[48].
Le visiteur accède ensuite de plain-pied dans la Grand-Rue du village[Note 7], voie étroite qui monte vers l'abbaye en serpentant entre deux rangées de maison qui datent pour la plupart de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle (maison de l'Arcade en encorbellement[Note 8], maison de l'Artichaut, hôtel Saint-Pierre, pastiche de la famille Picquerel-Poulard construit en 1987 en face de l'hôtellerie de La Licorne, logis de Tiphaine qui abrite le quatrième musée privé du mont et qui appartient toujours aux descendants de Bertrand du Guesclin[50]). La montée finale vers la porte de l'abbaye se réalise par le grand degré (escalier) extérieur. Large de 4 mètres, il était barré à mi-rampe par une porte pivotante, gardée par un veilleur installé dans un renfoncement visible à gauche. Les Montois appellent cet escalier le Monteux[51].
Le chemin de ronde des remparts offre de nombreux points de vue sur la baie, à perte de vue mais aussi sur les maisons du bourg. Les îlots d'habitations sont composés de deux types de constructions, des maisons en pan de bois et en pierre mais la colorisation des façades ne permet pas toujours de les différencier[52].
Un petit escalier rejoint sur la droite la cour de la barbacane crénelée conçue à la fin du XIVe siècle durant l'abbatiat de l'abbé Pierre Le Roy. Dotée de postes de surveillance percés de meurtrières, elle protégeait le châtelet d'entrée de l'abbaye constitué de deux tours rondes posées en encorbellement, supportées par des culs-de-lampe pyramidaux moulurés. La cour est dominée par le pignon oriental de la Merveille et par la silhouette fuselée de la tour des Corbins[Note 9] qui la flanque. Sous l'arc surbaissé de l'entrée, s'engage un escalier très raide qui se perd dans l'ombre de la voûte, ce qui lui vaut d'être appelé « le Gouffre ». Il conduit à la salle des Gardes, véritable entrée de l'abbaye[53].
Soixante-et-un immeubles situés sur l'îlot sont protégés au titre des monuments historiques[5], par plusieurs campagnes de protection, réalisées notamment en 1928 et 1934.
L'abbaye et le Centre des monuments nationaux
Article détaillé : Abbaye du Mont-Saint-Michel.
L'abbaye, les remparts et certains immeubles, dont le bâtiment dit les Fanils, sont propriétés de l'État et gérés par le Centre des monuments nationaux, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de la Culture. En 2011, l'abbaye a reçu 1 335 000 visiteurs. Elle est le second monument national le plus visité, après Notre-Dame de Paris (la tour Eiffel et le château de Versailles n'étant pas gérés par le CMN).
Les Fraternités monastiques de Jérusalem
Depuis 2001, des frères et des sœurs des Fraternités monastiques de Jérusalem, venues de l'église Saint-Gervais de Paris, assurent une présence religieuse toute l'année. Ils remplacent les moines bénédictins, qui étaient revenus au Mont depuis 1966. Ils sont les locataires du Centre des monuments nationaux et n'interviennent pas dans la gestion de l'abbaye.
Ainsi, chaque jour, la communauté se retrouve pour les offices dans l'abbatiale (ou dans la crypte Notre-Dame des Trente Cierges en hiver), rendant ainsi à l'édifice sa destination originelle, pour prier et chanter la gloire de Dieu. Cela ne manque pas d'attirer visiteurs et pèlerins qui, nombreux, viennent assister aux diverses célébrations.
La restauration d'une maison du Mont, le « Logis Saint-Abraham », a été entreprise par la communauté, et permet, depuis octobre 2012, d'héberger des pèlerins retraitants.
Héraldique
Les armes de la commune du Mont-Saint-Michel se blasonnent ainsi :
D'azur aux deux fasces ondées cousues de sinople et aux deux saumons d'argent posés en barre l'un sur l'autre, celui du chef contourné, brochant sur le tout[54],[55]. Ce blasonnement fautif car à l'enquerre serait une simplification d'une forme plus ancienne (à droite), plus complexe mais non fautive.
Le blason de l'abbaye du Mont-Saint-Michel (de sable à 10 coquilles d'argent et chef de France) est souvent abusivement attribué à la commune.
Personnalités liées à la commune
- Robert de Thorigny, célèbre abbé du mont ;
- Guillaume de Saint Pair, moine de l'abbaye auteur du Roman du Mont-Saint-Michel ;
- Le duc de Chartres (futur Louis-Philippe Ier), venu démolir la « cage de fer » ;
- Mathurin Bruneau, sabotier, escroc et faux Louis XVII, prisonnier au mont en 1821-1822 ;
- Louis Auguste Blanqui, prisonnier politique au mont ;
- Armand Barbès, prisonnier politique au mont ;
- Monseigneur Jean-Pierre Bravard, sacré évêque de Coutances le 28 octobre 1862, il démissionne le 27 novembre 1875 pour s'éteindre moins d'un an plus tard ; il est le restaurateur de l'abbaye ;
- Henri Voisin, né à Saint-Mandé (Val-de-Marne) le 6 août 1861, mort en Indre-et-Loire le 4 décembre 1945 est une personnalité artistique de la Manche, illustrateur et graveur ; il consacre à la Merveille pas moins de trois cents gravures à l'eau-forte. En outre, il écrit plusieurs livres et brochures et en illustre de nombreux autres. Conjointement à cette activité artistique intense, Henri Voisin, désireux d'assurer la sauvegarde du Mont, fonde, le 27 décembre 1911, avec l'aide de Paul Deschanel, l'association « les Amis du Mont-Saint-Michel » dont il est le secrétaire général durant vingt-sept ans. Selon David Nicolas, « de 1912 à 1938, chaque année, il a réalisé et remis une gravure grand format à chacun des membres de l'association qui ont ainsi pu se constituer une superbe collection de 27 gravures différentes ». En 1938, il est fait chevalier de la Légion d'Honneur pour son action en faveur du Mont-Saint-Michel[56] ;
- la Mère Poulard, restauratrice (voir ci-dessous) ;
- Émile Couillard, écrivain, historien du Mont et abbé du Mont-Saint-Michel.
Gastronomie locale
Le mont Saint-Michel se situe à l'embouchure du Couesnon. Côté terre, des aménagements de digues déjà anciens ont permis jusqu'à aujourd'hui de gagner sur la mer des terrains consacrés à l'agriculture et à l'élevage (dont celui des ovins, qualifiés de moutons de pré-salé). Le mouton ou l'agneau de pré-salé est ainsi une spécialité locale, à déguster de préférence grillé au feu de bois.
Une grande activité médiatique, à laquelle a participé de facto le dessinateur Christophe avec sa famille Fenouillard entoure la préparation de l'omelette de la mère Poulard, cette Bourguignonne née à Nevers arrivée à 21 ans en Normandie (du nom du restaurant situé dans le village et réputé pour cette spécialité). Celle-ci est faite d'œufs et de crème fraîche, abondamment battus en neige dans une bassine de cuivre avec un long fouet sur un rythme spécial que peuvent entendre les passants avant d'être cuite dans une poêle de cuivre sur un feu de bois.
Manifestations sportives
- Le marathon de la baie du Mont-Saint-Michel relie depuis 1998 Cancale au mont.
- Le mont a accueilli à plusieurs reprises le Tour de France cycliste. Le grand départ 2016 y a été donné.
Le Mont-Saint-Michel et les arts
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Dans la peinture
La Fête de l'Archange, Les Très Riches Heures du duc de Berry, musée Condé, Chantilly, ms.65, f.195
Dès le Moyen Âge, le Mont-Saint-Michel fait l'objet de représentation, particulièrement dans des manuscrits enluminés. La représentation la plus célèbre se trouve sans doute dans les Très Riches Heures du duc de Berry, illustrant la fête de l'archange dans le livre d'heures. La miniature est attribuée à l'un des frères de Limbourg, qui l'a peinte entre 1411 et 1416. Mais on retrouve le mont représenté dans au moins sept autres livres d'heures du XVe siècle. C'est le cas notamment dans Les Très Belles Heures du duc de Berry ou heures de Bruxelles, dans une scène de fuite en Égypte (vers 1400), dans les Heures du Maréchal Boucicaut (musée Jacquemart-André) au folio 11v (vers 1405), dans les Heures Sobieski conservées au château de Windsor, (f.204v) attribué au Maître de Bedford, le Livre d'heures à l'usage de Nantes conservé à la Bodleian Library (1450-1455)[57].
Edward William Cooke : Mont Saint-Michel, Normandie (1831, Victoria and Albert Museum)
John Ruskin : La Merveille (1848)
William Stanley Haseltine : Le Mont-Saint-Michel (1868, musée des beaux-arts de San Francisco)
Emmanuel Lansyer : Le cloître du Mont-Saint-Michel (1878, musée des beaux-arts de Quimper)
Jean-Jacques Monanteuil : Mont-Saint-Michel (sans date, musée d'Art et d'Histoire de Lisieux)